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«Monsieur le Chef du Gouvernement, soyez le bienvenu dans la Rotonde.»

Monsieur le Chef du Gouvernement... Voilà qui sonnait tellement mieux qu'Orateur sénatorial... Oui, Lord Janos avait réussi son pari, et il n'en était pas peu fier. Depuis la Débâcle d'Artorias, il avait su placer ses pions un à un, patiemment, méticuleusement, et se construire la figure d'un leader politique, et forger le Rassemblement Républicain, devenir Vice-Chancelier, et acquérir maintenant le titre de Chef du Gouvernement. Et parallèlement, Maître des Forges... Plus rien ne semblait pouvoir l'arrêter. Quelle serait la prochaine étape, désormais ? Il avait bien une idée en tête, mais il fallait vérifier au préalable si elle était techniquement possible.

Le Lord adressa un regard mi-amical, mi-autoritaire au soldat qui l'avait accueilli, de ce regard paternel qui sied tant à ces chefs de guerre appréciés de leurs hommes.

«Je vous remercie, soldat.», dit-il en pénétrant dans la salle circulaire réservée à la Chancellerie.

Il prit place dans l'élégant fauteuil qui lui était dédié et ouvrit un document holographique empli de données numériques et statistiques. Il les consulta mentalement et tenta de mieux les assimiler encore, afin de se préparer à une lecture si peu plaisante. Une fois qu'il eut terminé, son cadran lui indiqua qu'il lui restait très exactement sept minutes trente-trois avant de parler dans l'assemblée. Il ouvrit donc un fichier que lui avait envoyé sa nouvelle secrétaire, cette petite sotte de Barns, qui, comme toujours, était saturé de fautes d'orthographe et de tournures maladroites. Son esprit vagabonda quelques instants dans le souvenir de mademoiselle Evans, sa rigueur, sa fidélité, quand apparut soudain le nouvel Orateur sénatorial, Leero Coret, petit rodien insignifiant et sans grand charisme, que le Chancelier avait placé à cette fonction pour des raisons strictement politiques.

«Monsieur l'Orateur sénatorial, bonjour. Prêt pour cette séance ?»

Le nouveau venu se racla la gorge.

«Autant qu'on puisse l'être, j'imagine... Vote du budget, aujourd'hui...»

«En effet. Quelques modifications conséquentes, mais je ne m'en fais pas trop. Le gouvernement a le vent en poupe, et les sénateurs ont besoin d'un peu d'audace, en ce moment.»

«Ah ? Vous croyez ? Parce que tout de même...»

Janos se releva.

«L'audace, mon cher Coret, est à la mode en ce moment. J'imagine que notre contexte de conflit nous y incite. Entre nous, c'est peut-être l'un des rares avantages de la guerre par rapport à la paix : on y goûte enfin la saveur amère de la nécessité. Un capitaine de navire n'aura jamais autant d'audace qu'au moment où coulera son navire.» Il s'interrompit, adressa un regard interrogateur à l'Orateur sénatorial. «À méditer.»

«Si vous le dites...»

L'heure était venue. Les deux hommes allèrent rejoindre la nacelle réservée à la Chancellerie. D'une main tremblante, Coret appuya sur le bouton qui permit à la plate-forme de s'élever lentement, de traverser le sol et de s'ériger dans les airs, au cœur de la Rotonde. Plus le temps passait, plus Janos tirait de plaisir à apparaître au milieu de tous les regards. Il sentait d'une manière toute viscérale le véritable poids de son importance. Seul, abandonné, il l'était. Mais au moins avait-il su combler ce manque avec la force et la ténacité de l'ambition. Il se savait dans une dynamique positive : tout ce pour quoi il s'était battu prenait un sens nouveau, inédit. Il se sentait plus libre, surtout, moins entravé par toutes ces notions... Ordre... Harmonie... Paix... Cosmos... Depuis combien de temps n'y avait-il pas songé ?

«Bonjour à tous.», déclara Leero Coret d'une voix que Janos trouva trop frêle. «Eh bien... Comme vous le savez, nous allons procéder aujourd'hui au vote du nouveau budget. La Présidence accorde donc la parole au Chef du gouvernement et Vice-Chancelier Côme Janos.»

Le Lord fit un pas en avant.

«Sénateurs, sénatrices, bonjour. Vous n'êtes pas sans savoir que le remaniement ministériel engagé par notre nouveau gouvernement entraînera des transformations dans le budget. Certains fonds seront ré-attribués, d'autres redoublés. La transparence nous invite donc à soumettre cette décision majeur à des délibérations, puis à un vote. Voici les chiffres.»

Tandis qu'ils apparaissaient en grand, le Chef du Gouvernement les lut d'une voix claire, ferme et audible.


ANCIEN BUDGET ANNUEL DE LA REPUBLIQUE.

RECETTES.


• Participation au Fonctionnement de la République (11% du RBP) : 1600 milliards de crédits.

• Taxe sur la Valorisation de la Production (5%) : 70 milliards de crédits.

• Taxe sur l'énergie et les matières premières : 400 milliards de crédits.

• Taxe Variable sur le Transport : 150 milliards de crédits.

• Revenu Exceptionnel (lié à la campagne de lutte contre la fraude fiscale des entreprises) : 12 milliards.

Total : 2850 milliards de crédits.

DEPENSES.

• Ministère de la défense : 1000 milliards de crédits.

• Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’agriculture : 750 milliards.

• Ministère de l’éducation, de la culture et de l’action sociale : 650 milliards.

• Ministère de la santé et de l’environnement : 300 milliards de crédits.

• Ministère de la recherche : 190 milliards de crédits.

• Ministère de l’intérieur : 225 milliards de crédits.

• Ministère de la justice : 40 milliards de crédits.

• Sénat Galactique : 12 milliards de crédits.

• Subventions spéciales : 4 milliards de crédits.

Total : 3171 milliards de crédits.

Total : – 319 milliards de crédits.



NOUVEAU BUDGET ANNUEL DE LA REPUBLIQUE.

REVENUS.


• IPP (Impôt sur les Personnes Physiques) : 1600 milliards de crédits.

• IGF (Impôt sur les Grandes Fortunes) : 450 milliards de crédits.

• TVP (Taxe sur la Valorisation de la production, la Taxe sur l’énergie et les matières premières est désormais comprise dans la TVP ; 5%) : 500 milliards de crédits.

• ISoc (Impôt sur les Sociétés, limitation aux entreprises ayant une envergure fédérale) : 900 milliards de crédits.

• TVT (Taxe Variable sur le Transport) : 150 milliards de crédits.
 
• Taxes douanières : 100 milliards de crédits.

• TVEAR (Taxe variable sur l’entretien des Armées de la République) : 100 milliards de crédits.
 
• PEPF (Participations dans les Entreprises Publiques Fédérales) : 250 milliards de crédits.

Sous-total : 4000 milliards de crédits.

DEPENSES.

• Ministère de la Défense : 1800 milliards de crédits.

• Ministère du Trésor et de l’Economie : 600 milliards de crédits.

• Ministère de l’Industrie, de l’Energie et du Développement sectoriel : 600 milliards de crédits.

• Ministère des Affaires Sociales, du Travail et de la Santé : Loi de Finance de la Sécurité Sociale (LFSS) + 250 milliards de crédits.

• Ministère de la Recherche, des Technologies et des Entreprises publiques : 450 milliards de crédits.

• Ministère du Commerce, de l’Agriculture et de l’Environnement : 100 milliards de crédits.

• Ministère de la Justice : 40 milliards de crédits.

• Ministère de la Sécurité Intérieure : 500 milliards de crédits.

• Ministère de l’Education et de la Culture : 0 (transfert de compétence aux Systèmes Régionaux).

• Sénat galactique : 10 milliards de crédits.

• Coût des nationalisations (étalé sur quinze ans) : 100 milliards de crédits.

Sous-total : 4450 milliards de crédits.

Total : 4000 miliards - 4450 milliards = - 400 milliards de crédits.



Une fois la lecture terminée, Lord Janos demanda :

«Avant que nous ne procédions au vote, quelqu'un souhaite-t-il s'exprimer ?»

En posant la question, il s'aperçut que celle-ci aurait dû être prononcée par le nouvel Orateur sénatorial, qui d'ailleurs lui adressa un regard noir - quoique peu effrayant. Le Chef du Gouvernement haussa négligemment les épaules. Oh, et puis après ?
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HRP : Le sujet est officiellement clos. Comme l'opposition ne s'est pas manifestée, nous allons maintenant pouvoir procéder au vote.
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