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« - Mademoiselle Evans, comme vous le savez, le mois arrive bientôt à son terme et... J'ai pu constater un problème de poids dans les rapports des Ressources Humaines de ce mois-ci. En effet, la Directrice Adjointe de ce département m'a averti que vous aviez cumulé depuis le début du mois vingt-quatre journées de travail de huit heures trente pour zéro journée de repos. »

Je ne prenais même pas la peine de lever les yeux vers l'Ithorien volubile qui prenait un malin plaisir à venir tenter de me perturber en plein exercice de mes fonctions. Depuis mon intégration dans les rangs de l'administration du Parti, tous les mois, au vingt-quatrième jours – sauf mission singulière –, c'était au même manège que s'adonnait Monsieur Khaf Caïen, sous-secrétaire de la Directrice Adjointe des Ressources Humaines Löras Kheen.

« - Vous aurez, Mademoiselle Evans, facilement réalisé le produit et constaté que vous avez déjà généré pour ce mois une quantité de deux cent quatre heures de travail pour le bénéfice du Parti Cosmos. Or, vous n'êtes pas sans ignorer l'article 8, alinéa 16, paragraphe 2 du Code du Travail Républicain relatif aux charges horaires maximum assumée par les employés dans les hautes administrations des organisations politiques républicaines. »

Parfois, je ne pouvais m'empêcher de constater combien l'Idéal de notre Parti était tout à fait inaccessible à un trop grand nombre de nos collaborateurs. La plupart d'entre eux ignorait purement et simplement les notions – pourtant claires – de dévouement et d'abnégation qu'exigeait la Fin qui était la nôtre. Tous ces idiots, tous ces vecteurs d'éléments chaotiques – erreurs d'emploi du temps, de réservation de salles et autres coquilles criardes disséminées en bataillons entiers dans les courriels officiels –, tous ces parasites n'étaient bons qu'à une chose : empêcher les honnêtes gens de travailler.

« - Loin de moi donc l'idée de me montrer discourtois face à un zèle tout à fait admirable mais... Mademoiselle Evans, je vous en prie, prenez vos jours de congés ! Vous flirtez avec l'illégalité en agissant de la sorte et si une telle chose venez à se savoir, qui sait la façon dont les médias déformeraient l'information afin de nuire à l'image de notre bon Sénateur Janos ? »

Vil flagorneur...

« - Monsieur Caïen, sachez d'abord que je ne « flirte » jamais avec rien ni personne et que ce genre d'analogie sexiste et pour le moins déplacée me permettrait à elle seule d'obtenir votre licenciement. Sachez ensuite que la façon dont je gère mon travail auprès de Monsieur le Sénateur ne vous regarde en rien, que je n'ai de compte à rendre qu'au Sénateur et au Sénateur seul et que je n'ai jamais rien réalisé en plus de dix ans de service en tant que Secrétaire Particulière du Sénateur d'Aargau qui eût pu, même de loin, être assimilé au mot « illégalité ». De plus, vous oubliez les vingt-quatre heures supplémentaires que j'ai passées à réparer les erreurs de votre service, et ce, à titre gracieux. Enfin, vous saurez que la loi m'autorise à transformer mes jours de congés non-désirés en un versement à hauteur du nombre d'heures travaillées en plus que le quota stipulé dans mon contrat – les dites heures étant considérés comme « complémentaires » à un taux de 1,75 % du salaire normal. »

Je n'avais pas besoin de fixer le sous-secrétaire pour savoir que celui-ci venait de virer au teint gris pâle.

« - Sauf votre respect, c'est une chose que financièrement notre comptabilité ne eut se permettre, Mademoiselle Evans. »

« - C'est une chose que notre comptabilité se devra de supporter faute de personnel assez qualifié pour me remplacer durant mon absence. »

La pique avait été cinglante et je l'avais accompagné d'un regard meurtrier à l'adresse de ce fieffé pendard. À présent, c'était un duel électrique d’œillades assassines que nous nous livrions tout deux. Il fallut pas moins de seize secondes avant que cet outrecuidant prétentieux ne se décide à baisser les yeux et à soupirer, signifiant ainsi son abdication face à l'implacable Vérité.

« - J'étais persuadé que vous répondriez cela. C'est pourquoi j'ai pris la liberté de demander à Monsieur le Sénateur Janos de nous accorder une entrevue afin qu'il prenne lui-même le soin de trancher ce litige. »

Le rat ! Le scélérat ! L'affreux petit enfoiré ! Ne laissant rien transparaître de la fureur péléïdienne qui m'habitait, je me levai et, glaciale, répondais ainsi à l'invitation de ce « cher » collaborateur de nous rendre dans le bureau du Sénateur. Nous n'eûmes qu'à nous présenter devant les larges portes à double-battants pour que celles-ci s'ouvrent ; nous étions effectivement attendus.

Lorsque nous pénétrâmes dans le bureau, le Sénateur était en pleine étude des bilans préliminaires relatifs à la construction d'une nouvelle cité sur Aargau, Lithopolis, destinée à permettre l'intégration des nouveaux réfugiés qui avaient fui les systèmes récemment passé sous l'obédience Sith. Ces derniers étaient assez mitigés et je ne savais que trop bien dans quel état les bilans mitigés pouvaient mettre le Sénateur. Non, vraiment, ce sous-secrétaire disposait d'un don hors du commun pour se trouver inopportun.

Le Sénateur désactiva l'écran géant qu'il consultait jusqu'à présent et laissa entrer la douce lumière de Coruscant dans la pièce avant de faire pivoter son fauteuil et de nous faire face. Ce plissement aux coins de ses yeux ne laissaient aucun doute : le Sénateur était effectivement passablement agacé.


« - Mademoiselle Evans, Monsieur Caïen, que me vaut – de nouveau – ce plaisir ? »

L'individu à la face grisâtre ne me laissa pas le temps d'exposer au Sénateur la situation – ridicule – dans laquelle nous nous trouvions. Il se racla la gorge et commença:

« - Je suis tout à fait conscient que vous auriez bien mieux à faire, Monsieur le Sénateur, mais je n'ai su trouvé aucune autre solution. »

Le Sénateur claqua sèchement la langue, exaspéré, pour interrompre la voix rauque et monocorde de l'Ithorien.

« - Si vous êtes assez perspicace pour vous rendre compte du fait que vous me fassiez perdre mon temps, pourquoi ne pas en venir directement au fait ? »

Le peu d'assurance que le sous-secrétaire était parvenu à rassembler s'effondra tout à coup, la Raison ne donnant de courage qu'à ceux qui en étaient les garants.

« - Et bien, Mademoiselle Evans refuse, encore une fois, de prendre le moindre jour de congés s'ils ne lui sont pas donnés expressément par Vous, Monsieur le Sénateur. »

Il me fallait réagir immédiatement.

« - Si je ne peux me permettre ce luxe que sont les jours de repos, qui – soit dit en passant – semblent tenir particulièrement à cœur à nos collaborateurs, c'est d'abord et avant tout parce qu'aucun d'entre eux n'est capable de me remplacer sans instaurer un Chaos inextricable dans mon travail. »

Le Sénateur se passa une main sur le visage en soupirant, force était de constater qu'il était tout à fait d'accord avec nous.

« - Mademoiselle Evans, vous allez prendre vos jours de repos mensuel. »

« - Comment ? Mais... »

« - Mademoiselle Evans, je ne veux plus vous voir dans nos locaux avant le premier du mois prochain. Faites ce que vous voulez, occupez-vous, mais je ne veux plus vous voir derrière votre bureau avant la neuvième heure d'Atunda. »

Je m'apprêtais à me défendre à nouveau mais le regard azuré se fit d'acier.

« - Mademoiselle Evans, J'ai dit. »

« - Très bien, Sénateur. »

Il était grand temps que l'Ordre s'insère de nouveau dans cette galaxie fébrile...


| – | – * – | – |


Allongée sur l'une des plus hautes branches du baobab de l'Enclave, je balance doucement la jambe tandis que mon dos repose contre le tronc massif de ce pluricentenaire. Mes yeux se perdent dans l'analyse du jeu complexe de la lumière solaire qui, valsant entre les oblongues émeraudes, ruisselle, me conservant dans cette équilibre précaire de la parfaite torpeur. La pénultième heure méridienne n'est plus loin. Les derniers lambeaux de brumes, dont certains planent encore au pied de l'arbre, finissent de disparaître, chauffés à blanc.

La matinée s'est écoulée au rythme des déambulation. Le rapport au temps est singulier en ces lieux. Si l'on sent qu'il s'y écoule, pourtant l'immobilisme des tentures végétales, la perfection du dallage moussu, cette façon que les habitants du lieu ont de respecter son silence tendent à vous le faire oublier, faisant naître au fond de l'esprit cette étrange sensation de flottement, d'irréalité.

Mon vagabondage a débuté dans un lieu commun, ce cercle surélevé où se trouve encore mon vaisseau et qui, logiquement, sert depuis toujours de « grandes portes » à ces lieux. De là, mes pas, guidés par ma perception de l'endroit et son inclination propre, sont parvenus à un premier puits circulaire, presque identique à celui-ci, autrefois point névralgique, aujourd'hui plongé dans cette atemporalité subjective.

J'ai délaissé rapidement les chambres et cellules de même que que le couloir menant à la grande esplanade au profit de l'ancienne salle du Conseil Jedi local. Là, un tout autre spectacle s'étend. Au cœur de cette calme Harmonie, se trouve ce large cercle imprégné par l'odeur de mort. Pas une seule liane, pas une seule fleur ne la gagne, ne s'y élève. Dans cette chambre où la Sagesse aura rayonné puissamment durant de nombreuses années, une maladive règne ici, étendant un linceul de mousse grisâtre sur des dalles que je n'ose pas fouler.

Les informations sur l'Histoire de l'Enclave Jedi de Dantooïne sont rares, aussi bien sur l'Holonet que dans nos archives personnelles. L'espoir de trouver plus d'information sur ce qui s'est passé en ces lieux depuis la Guerre Civile des Jedis et le sac de l'endroit par les forces du Seigneur Malack m'a poussé ensuite plus profondément dans les entrailles du bâtiment. Le bilan que je dresse de la visite minutieuse des nombreuses pièces, dont je ne devine qu'à peine les anciennes fonctions, ne me permet même pas de dresser une hypothèse sur la personne à l'initiative de la reconstruction de ce lieu à l'identique. Alors comment le Sinistre s'est-t-il glissé au cœur de la Paix ?

Après cela, je me suis rendue dans l'ancienne salle des Archives dont les rayonnages bleutés ne luisent plus d'aucune Connaissance. Le Silence. La Sérénité. Partout. Du vide entremêlé de branches, de fleurs, de feuilles et de pollen. Un bien étrange mausolée qui ne renferme aucun corps. Face à ce néant fascinant de l'Histoire, je n'ai pu qu'admettre ma défaite, momentanément, et battre en retraite.

Un grognement attire mon attention vers la périphérie de la salle. Contre le mur, un représentant de la faune locale, un chien Kath, attiré par l'odeur, s'adonne avec ardeur à la décapitation de l'un des corps, sûrement encore chaud, des pillards que j'ai rencontré. Ceux-là, certainement déçu de n'avoir pas trouvé plus de trésors en ces lieux que moi, ont cru pouvoir rentabiliser leur expédition par l'acquisition, en ma personne, d'une nouvelle esclave. Ils l'ont cru du moins jusqu'à la mort soudaine du premier. La Nature, aussi dérangée que moi par cette présence importune, s'attelle déjà à faire la faire disparaître.

Souriant légèrement, je me laisse aller à nouveau contre l'arbre, fermant les yeux sous le masque. Après tout, j'ai reçu l'ordre de faire ce que je veux et, puisque ici l'Ordre n'avance plus, se contentant d'être pleinement vivant et harmonieux, pourquoi ne puis-je pas en tirer un quelque plaisir?
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« L’objectif est sécurisé, l’équipe peut partir en toute tranquillité. »

« Très bien, nous vous remercions de votre collaboration, Maître Von. »

Alyria vit l’image de son correspondant s’évanouir, et rangea son comlink avec une satisfaction non dissimulée. Cela faisait trois jours qu’elle était sur Dantooine et elle était heureuse de pouvoir s’acquitter de sa mission sans problèmes majeurs. En effet, l’équipe d’archéologues perdus avait été retrouvée rapidement, et les efforts conjugués de ces derniers et du maître jedi avaient permis d’extraire les survivants des décombres de l’éboulement, et de sécuriser rapidement la zone accidentée de l’ancienne enclave jedi, abandonnée depuis un certain temps.

Avec un soupir, Alyria se rappela ce qui l’avait conduit là de prime abord. La révélation de Lorn avait fait l’effet d’une bombe sur elle : la trentenaire devait réfléchir, et malgré sa bonne volonté, elle ne pouvait le faire au temple. C’est pourquoi, quand la République demanda des volontaires pour aider une équipe de chercheurs sur Dantooine, elle sauta sur l’occasion, qui lui permettait de s’éloigner du Temple, de s’occuper en se changeant les idées, et enfin pouvait lui offrir la possibilité alléchante de méditer dans un endroit au calme, chargé d’histoire, qui ne manquerait pas de l’éclairer sur le chemin à prendre. Enfin, du moins elle l’espérait.

Trouver les scientifiques une fois débarquée ne fut pas particulièrement difficile : un éboulement avait piégé sous des monceaux de gravats certains des leurs alors qu’ils faisaient des fouilles au nord-est de l’ancienne enclave, et les moyens sur place étaient bien trop limités pour extraire les corps, sans parler de la simple idée de localiser d’éventuels survivants. Si, dans un premier temps, ils se montrèrent assez déconfit face à la faiblesse numérique, ils durent bientôt convenir qu’avoir une manipulatrice de Force à leurs côtés avait des avantages évidents.

Alyria s’était plongée à corps perdu dans sa mission, faisant tout son possible, et après trois jours, tout était enfin terminé. Mais plutôt que de suivre immédiatement les archéologues qui venaient de décoller, elle avait préféré rester un peu en arrière, profitant autant de la solitude agréable et du silence apaisant des lieux, que seule une brise légère venait altérer que de la possibilité de méditer tranquillement, sans crainte d’être dérangée et dans une atmosphère historique qui invitait aussi bien au calme qu’à la réflexion. Pénétrant dans l’ancienne salle du Conseil, la trentenaire observa le spectacle qui s’offrait à elle et se laisser bercer par la majesté des lieux, ressentant les esprits des centaines de jedis ayant parcourus ces allées des siècles avant elle. Alyria s’assit en tailleur, dans une position typique de méditation, et commença à faire le vide dans son esprit.

Elle entreprit de réciter mentalement le Code jedi, et une sorte de discussion interne s’engagea dans sa tête, afin d’y réfléchir une fois de plus. Pour court qu’il soit, le Code avait cet avantage que sa formulation laissait une certaine place à l’interprétation. Des générations de jedis n’avaient cessé d’en débattre, alternant joutes philosophiques et vision littérale, et sans doute qu’une vie entière n’aurait pas suffi pour en venir intellectuellement à bout. C’était toute la force de cet ensemble de préceptes, dont chacun avait une interprétation personnelle, qui sans contrevenir à l’acceptation générale de sa signification au sein de l’Ordre, amenait des variantes intéressantes.

Tout à sa méditation, Alyria mit un certain temps à s’apercevoir d’une présence étrange qui semblait perturber la Force dans les environs du Temple. Elle n’arrivait pas à l’identifier, et ce pouvait être aussi bien un remous dû à l’histoire chargée du lieu qu’à la trace d’une autre personne. Cependant, étant donné que les pirates de tout poil étaient souvent présents dans de telles ruines, la maîtresse d’armes préféra couper court à ses exercices philosophiques et, retrouvant le contact du sol, coupa sa lévitation et se releva promptement. La main sur la garde de son sabre, ses sens en alerte, elle se mit à arpenter de sa démarche féline les couloirs du Temple, se fiant à la Force, et finit par tomber sur un cadavre encore chaud, que dévorait goulûment un chien kath. Préférant éviter de déranger l’animal dans son festin, elle se glissa derrière le plus discrètement possible, et, le sabre dégainé, déclara de sa voix grave :

« Il y a quelqu’un ? »

Au pire, elle ferait fuir quelques bestioles, ou préviendrait une bande de pillards de sa présence, ce qui les ferait sans doute partir de suite. Et si jamais il y avait quelqu’un d’autre dans cette enclave, eh bien, elle lui offrait la possibilité de montrer que ses intentions étaient amicales. Dans le cas contraire… Elle était prête.
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Le cadre, comme mon humeur, est propice à la réminiscence et je me laisse doucement gagner par celle-ci, le passé se superposant à la vue complexe de l'Astre Solaire se diffusant dans les feuilles. Je la revois, incarnation de la Paix. Aucune peur, aucune ombre. À notre merci, dans mes bras. Le Hérault a ordonné, je n'ai eu d'autre choix que d'obéir mais… La Paix, l'Harmonie, l'Ordre, le Cosmos. Les quatre piliers fondateurs de notre Idéal. Nous ne tuerons qu'en cas d'extrême nécessité. La Nécessité. Malgré tout ce que le Seigneur Deinos m'a affirmé, au fond de… Moi. Je n'en suis pas convaincue. Avons-nous un seul instant envisagé une autre solution ? Comment ai-je pu concevoir un plan différent, tout aussi viable sans que notre Seigneur en soit capable ? Est-ce mon esprit qui ne parvient pas à discerner une donnée capitale ? D'autres souvenirs reviennent à la surface. Ce malaise dans la limousine, ce mensonge à propos de ce voyage diplomatique. L'allégeance prêtée à la Dame Noire. Nous avions toujours su attendre patiemment que les événements s'agencent parfaitement. Depuis combien de temps notre Seigneur n'en est-il plus capable ?

Son ascension dans les hautes sphères du pouvoir a été précipitée par sa rencontre avec le Chancelier Suprême Arnor. Le Côté Obscur, je l'ai senti grandir en lui. Ce qui n'a été jusque là qu'un outil a commencé de le ronger. Ses fureurs, superbes, le plongent désormais dans la plus complète irrationalité. La quitte-t-il jamais vraiment ? La douleur qui d'ordinaire vrille mes tempes ne semble pas décidée à interrompre aujourd'hui le fil de ma pensée.

Un problème s'impose alors à moi : d'une part le Hérault reste mon Seigneur, porte-étendard de notre Idéal, et d'autre part celui-ci semble devenir progressivement lui-même vecteur de Chaos. Je sens que je touche là aux limites de mon enseignement. Il me faut désormais trouver les réponses ailleurs, compléter notre œuvre afin de pérenniser ce que mon Maître a commencé d'ériger et, à terme, parvenir à le convaincre de son erreur et le voir rayonner à nouveau, Astre Solaire au milieu de la masse terne du Cosmos. Au-delà de l'Histoire, c'est cette enseignement nouveau que j'ai poursuivi jusqu'ici. L'idée est curieuse, je le sens, et l'évidence veut que mon Maître n'en sache rien avant que le moment de le rétablir dans sa Fonction ne soit venu.

Alors pourquoi être venue consulter l'absence ? Les réponses ne seraient-elles pas plus accessibles avec pour medium les vivants ? Dois-je abandonner pour cela totalement les Ombres dont je suis depuis toujours si familière ? Non. Notre Idéal est superbe, pur. Il ne s'agit pas 'en changer la pensée mais l'outil, le moyen, et, en tant que Main, ne suis-je pas la plus à même d'accomplir cette recherche ? … Plus j'avance dans cette pensée et plus je me trouve écartelée entre ces deux certitudes : celle qui veut que je sois moi-même en plein égarement et l'autre, son antipode, qui voudrait que je sois justement en train de toucher du doigt une Vérité. Comment penser un Idéal quand son Messie se trouve frapper de mutisme, coupé de sa propre Foi, incapable de tout prêche ?

Un oiseau vient se loger sur ma cuisse, ses petits bonds parvenant à me faire sourire malgré mes inquiétudes. L'Ordre mérite ce combat. Les piaillements du petit être à plumes finissent de me ramener à la Réalité de ce qui m'entoure. Je prends soudain conscience de la fin approchante de ma solitude et de l'imprudence dans laquelle je me suis complu. Un signe de l'Ordre lui-même ?

Au milieu du vide, comme répondant mon appel silencieux, l'Harmonie m'a envoyé une compagnie.


« - Il y a quelqu'un ? »

« - Une Ombre dans le Silence d'un lieu mort, rassurez-vous. »

Je suis d'humeur taquine en plus d'être pensive. Je perçois la personne comme étant sensible à la Force ; Jedi, Sith ? Électron libre ? Est-elle seulement formée ? Je ne sais… Mais l'Ordre, dans sa précision, ne peut qu'avoir répondu à mon besoin. Je n'ai pas bougé, je suis toujours au sommet de l'arbre à balancer tranquillement une jambe tandis que ma voix, déformée par les filtres n'en finit pas de mourir en écho.

« - Êtes-vous perdue ? Ou bien espériez-vous découvrir ici tout autre chose que nous? »
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La Force avait cette manie intéressante de sans cesse surprendre Alyria. Ou le destin, la chance… Bref, les dénominations ne manquaient pas pour ce genre de choses, mais une constante évidente demeurait : alors qu’elle était venue dans l’espoir de méditer tranquillement dans un endroit isolé, elle se trouvait nez-à-nez, ou plutôt voix à voix d’ailleurs, avec une personne inconnue, dont le son des paroles lui apparaissait curieusement déformé, ce qui n’invitait pas franchement à la confiance.

Cherchant son interlocutrice mystère des yeux et à travers la Force, elle se rendit compte que la présence se trouvait… Juste au-dessus de sa tête, dans les branchages. Avec un léger sourire en coin, Alyria se retourna, faisant mine de rebrousser chemin, avant de se propulser en arrière dans une pirouette très fortement aidée par la Force, dans un mouvement que tout grand connaisseur de la forme Ataru aurait reconnu sans difficulté, surtout compte tenu de l’exécution quasi-millimétrée de la figure acrobatique. Atterrissant souplement sur une branche, elle prit quelques secondes pour stabiliser sa position avant de poser son regard émeraude sur l’individu inconnu qui lui faisait face.

La personne, sans doute une femme, à en juger par la voix, avait le visage couvert ce qui rendait l’identification presque impossible, mais ne semblait pas, du moins a priori, avoir d’intentions belliqueuses… Du moins pour le moment. Abaissant son sabre pour montrer qu’elle ne désirait pas engager d’hostilité sans toutefois l’éteindre, Alyria répondit sur le même ton que son interlocutrice :

« Si je puis me permettre, le début de votre phrase entre légèrement en contradiction avec la fin, votre méthode pour rassurer vos interlocuteurs potentiels me semble avoir besoin d’un sérieux rodage. »

Difficile de résister à une ouverture ironique aussi évidente. Alyria appréciait trop les joutes verbales pour ne pas sentir son intérêt piqué au vif, et cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas eu l’occasion de se laisser aller à quelques commentaires dont la politesse exquise n’empêchait pas l’humour. Néanmoins, la prudence lui dictait une approche certes douce, mais clairement inquisitrice. Par principe, il aurait fallu être particulièrement stupide pour ne pas se méfier d’une personne masquée parlant par énigme dans un Temple abandonné… Maintenant qu’elle y pensait, la trentenaire avait l’impression de vivre un scénario de holo de série B…

Toujours sur le même ton calme et contrôlé, elle continua :

« Pour répondre à votre question, j’aurais peut-être besoin de savoir ce que j’ai trouvé, vous serez sans doute d’accord avec moi. A qui donc ai-je l’honneur ? »

Puis, histoire d’enfoncer le clou de la politesse, elle déclara :

« Néanmoins, je vais commencer les présentations, puisque je vous demande votre nom, autant donner le mien. Maître Alyria Von du Temple d’Ondéron. »


Après tout, son identité n’était pas un secret, et vu sa chevelure très, très reconnaissable, dire le contraire aurait paru pour le moins saugrenu. Seulement, Alyria devait l’avouer, dire son rang avait aussi une intention préventive : rare était les personnes suffisamment idiotes pour ne pas y penser à deux fois avant d’attaquer un maître de l’Ordre, surtout quand un de ces derniers avait son sabre dégainé en face de vous. Prudence toujours.
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Dans la faible densité du cortège des élus de la Force, mon interlocutrice est sans aucun doute à compter parmi les plus hauts représentants de ceux-ci. Là, tout en haut de mon arbre, je ne peux être plus exposée. Je pars simplement du principe qu'un Sith ne prévient pas, qu'il se contente de frapper le premier, pour croire en la bienveillance de ma compagnie nouvelle. Sa voix m'est inconnue. Cueillie sur le vif, je n'ai pas eu le temps de capturer son emprunte vocale pour laisser à la Technique le soin de palier aux limites de mon esprit.Rien ne presse ici. Mon invitée s'est déjà montrée bien plus loquace que moi et je me tiens désormais prête à recueillir sa verve au creux de mon oreille et de mes circuits.

Ce félin personnage, m'imitant, prend de la hauteur et s'envole pour venir se poser sur une branche adjacente à la mienne, provoquant la fuite de mon duveteux ami, ne remuant qu'à peine la solide structure de ce vieux seigneur végétal sur lequel nous siégeons de concert à présent. Si la voix m'est inconnue, le visage l'est bien moins. Ma mémoire, de façon spontanée, place ses traits comme faisant partie fréquemment du corps diplomatique Jedi. Une rapide analyse physiognomique effectuée par l'ordinateur confirme mes présupposés et, bien vite, la lame violette finit d'identifier la personne que l'emprunte vocale ne rendra que plus davantage certaine : le Maître d'Armes Alyria Von.


« - Si je puis me permettre, le début de votre phrase entre légèrement en contradiction avec la fin, votre méthode pour rassurer vos interlocuteurs potentiels me semble avoir besoin d’un sérieux rodage. » Rien que le calme dans cette voix, si ce n'est ce bourdonnement constant d'une lame déployée.« Pour répondre à votre question, j’aurais peut-être besoin de savoir ce que j’ai trouvé, vous serez sans doute d’accord avec moi. A qui donc ai-je l’honneur ? » Je ne dispose que d'un avantage certain. Mon anonymat. Dois-je me résoudre à le perdre au prétexte que la notoriété le lui refuse ? Une erreur sotte qu'il ne me plaît pas de commettre, je lui concède déjà bien assez de supériorité sans aller jusqu'à me couper à mon tour la main. Aucun jeu ne s'est jamais déroulé à armes égales, pourquoi aller jusqu'à briser cette constance ? Les habitudes sont déjà bien assez bouleversées ici pour ne pas renverser le monde tout entier en une seconde.Je lui subtilise alors la parole juste à temps pour compléter son titre:

« … Aussi connue comme la fameuse Main Brisée de l'Ordre Jedi. Une vraie légende qu'est la vôtre. Vous espériez peut-être nous l'apprendre ? Un petit rire, à peine un souffle saturant les filtrations, Voyons, Maître Von, nous vous connaissons depuis longtemps, de même que nous connaissions feu votre père. Nos condoléances à ce sujet. Si cette affaire remonte à loin, concédez que nous n'avions jusqu'à présent pas eu l'occasion de vous dire le bien que nous pensions de lui. »

Les informations défilent sous mes yeux au rythme de ma parole. Cela fait quelques années que ces informations ont été compilées. Depuis son intervention dans l'affaire des meurtres sénatoriaux, affaire qu'elle couronna de succès, elle bénéficie de l'attention de notre Seigneur qui lui a ouvert depuis lors son propre profil comprenant portrait – avant et après l'accident artorien –, son emprunte vocale – obtenue grâce aux dépositions de la jeune femme lors de son investigation auprès de la Cour Républicaine de Justice – mais également, bien plus tardives, des annexes ajoutées de ma main sur ce que j'avais pu étudier des capacités martiales de la Belle. Des années que je ne suis pas revenue à elle et à cette fascination qu'elle a su exercer sur moi comme rare ont été les Jedis à le faire.

« - Enfin… Si vous commenciez par éteindre votre fidèle ami ? Il ne vous aidera aucunement à obtenir mon nom et je dois dire que, de toutes les façons, nous n'avons pas plus envie de le porter à votre connaissance que de nous montrer hostiles à votre égard. Par ailleurs, à quoi bon ? Un nom n'a d'utilité que dans la mesure où il nous apporte d'autres informations rattachées de près ou de loin à son Histoire. Mon nom ne véhicule rien de cela. Il n'est connu que de peu de personnes et encore moins de vivants. Je le tairai donc, votre défiance soulignant à elle seule bien assez que vous me chargez déjà de bien trop de préjugés. »

Je lâche un soupire agacé, laisse retomber en arrière contre le tronc ma tête, jusqu'alors maintenue droite – observant les règles implicites de la discussion – afin de regarder la Jedi dans les yeux.

« - Non, vraiment, soyez sensible à la tranquillité du lieu, faute d'être encline à me faire confiance, ce bourdonnement ne lui sied plus. Regardez, je concède moi-même cet effort. »

Détachant les deux gardes qui pendent à mes côtés, je les laisse rouler contrer le tronc, brinquebalantes, désordonnées, et tomber dans l'herbe en contrebas où elles roulent encore jusqu'à l'immobilisme.
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Apparemment, dans la catégorie « rencontre potentielle dans une enclave abandonnée », Alyria venait sans doute de remporter le gros lot, soit un individu parfaitement mystérieux en sachant beaucoup trop sur sa personne. Formidable, elle avait une chance folle lorsqu’il s’agissait d’explorer des ruines, il fallait croire… Cependant, l’absence totale de caractère belliqueux du personnage ne manqua pas d’éveiller sa curiosité : autant en profiter pour percer ce mystère qui s’offrait à elle, les informations qu’elle pouvait tirer de cette entrevue perchée dans les hauteurs pouvaient s’avérer intéressantes. Et au pire, elle comptait sur sa rapidité d’action pour se sortir d’un éventuel mauvais pas.

Son interlocutrice était donc parfaitement bien informée, et si le fait que son nom soit connu ne lui procura pas un choc énorme, après tout, son physique était reconnaissable et ses nombreux voyages lui avaient effectivement conféré une certaine aura à travers la galaxie, l’allusion à son père la fit légèrement tiquer. Ce n’était pas un secret, certes, mais elle n’appréciait guère de se voir ainsi épié dans les moindres détails de son histoire. Qui apprécierait qu’un personnage masqué vous offre des condoléances pour une mort survenue plus de vingt ans auparavant ? 

En tout cas, cette déclaration lui offrait néanmoins un indice évident sur son vis-à-vis : cette femme devait forcément avoir des liens avec la politique ou le corps diplomatique républicain, la carrière militaire de son paternel remontant quand même à quarante bonnes années, au bas mot. Mais c’était un détail intéressant, et qui expliquait aisément la parfaite rhétorique employée par la figure masquée. Certes, Alyria n’avait à sa disposition que des suppositions, mais son esprit s’agitait déjà pour relier tous les éléments à sa disposition.

Sans perdre son calme olympien, elle déclara :

« Si je suis une légende, alors c’est que notre galaxie manque cruellement de grands conteurs, mais passons. J’ignorais que ma réputation ait pu à ce point traverser les murs du Temple, cependant, vous avez l’air d’être très bien renseignée sur ma personne pour que je puisse y voir une généralité. »



Puis, haussant les sourcils pour marquer son étonnement, et un certain déplaisir, elle pointa avec une certaine finesse :

« Puisque vous refusez de me donner votre identité, je ne peux guère savoir si nous nous sommes croisées un jour, mais à vrai dire cela n’a pas d’importance : mon père est mort il y a plus de vingt ans, je crains qu’il n’y ait prescription. »



Accessoirement, elle ne l’avait finalement que peu connu, et quand il était mort, si le choc avait évidemment été présent, elle ne l’avait pas revu depuis près de quinze ans. Autant dire qu’il fallait relativiser les choses. Mais cela n’empêchait pas l’amabilité :

« Enfin, puisque nous faisons assaut d’amabilité, je vous remercie pour ses condoléances, même si je tiens à préciser que si votre opinion vient de rapports basés sur ses prouesses amoureuses, je la prendrais avec des pincettes. »



La remarque se voulait humoristique, mais contenait un fond de vérité : après tout, elle ne pouvait pas savoir si son interlocutrice avait connu son père autrement que dans un lit, et cet aspect du personnage était un véritable secret de polichinelle. Parfois, Alyria se demandait même comme il avait fait pour n’avoir qu’une fille unique comme descendance. A moins bien sûr que certaines de ses partenaires d’un soir n’aient pas osé lui amener le fruit de ces ébats furtifs…

Chassant ces pensées, Alyria reprit, éteignant son sabre mais le gardant en main :

« Apparemment, puisque vous avez eu l’air d’en savoir beaucoup sur moi avec mon simple nom, je dirais au contraire qu’ils recèlent une certaine importance. Sans compter la pure politesse de la chose. Donner son nom est une marque de confiance entre gens de bonne compagnie, il me semble, aussi, il ne faut pas s’étonner d’une certaine méfiance quand on le refuse. Je ne juge que ce que je vois. Et ce que je vois tiens en peu de mots : une femme masquée sur un arbre dans une enclave perdue qui a l’air d’avoir une compilation particulièrement ordonnée de données privées. Avouez que cela ne rend pas franchement encline à la confiance. »



Cela eu l’air de la décider à ne plus la regarder dans les yeux, ce qui ne manqua pas de renforcer encore un peu la méfiance d’Alyria, surtout quand elle vit son interlocutrice laisser tomber deux sabre-laser. Ah c’est sûr que là, elle avait vraiment tous les éléments pour apprécier pleinement la situation. Peinant à dissimuler l’ironie voilée de ses propos, elle déclara :

« Me voilà pleinement rassurée. Une personne inconnue qui possède deux sabre-lasers et a une marque dans la Force suffisante pour que je la perçoive pendant ma méditation… Non vraiment, je ne vois pas du tout quel être normalement constitué pourrait se poser des questions quant à votre identité, ce serait tellement mal venu… »



Certes Alyria était quelqu’un de plutôt pondéré et calme, à la politesse proverbiale, mais elle pouvait tout de même se montrer franche et taper du poing sur la table quand la situation l’exigeait. D’une voix plus forte, elle demanda :

« Qu’êtes-vous ? Sith ? Autre ? »



Puis plus doucement, elle ajouta :

« J’ai besoin de quelques réponses. La situation étant ce qu’elle est, ne me reprochez pas cette prudence. Vous auriez fait de même à ma place. »


A moins bien sûr d’être ou parfaitement stupide, ou d’une naïveté confondante, mais étrangement, Alyria avait comme un doute quand il s’agissait d’appliquer de telles descriptions à son interlocutrice mystérieuse…
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Je la fixe à nouveau, le port du masque m'étant si familier que je l'oublie totalement.

« - Si nous étions à votre place et que nous trouvions en vous une menace les chiens Kaths recevrait une nouvelle pièce pour déjeuner. L'Ordre Sith... Que feriez-vous si je vous avouais y appartenir, Maître Von ? »

Un ton calme, posé, dont la tessiture même à travers le respirateur semble amusée.

« - À votre avis? Bien que l'option servir le dessert à vos chiens kaths me semble tentant, je vous demanderais d'abord vos intentions. Et en cas de menace directe, je me défendrais. Cela me semble convenable. »

Sa voix… à la fois porteuse d'une ironie acide et d'une douceur mesurée.

« - Est-ce là la seule façon dont, face à tant d'urbanité, nous nous verrions répondre ? Une "menace directe" ? Soyez sérieuse, s'il vous plaît. Nous sommes ici entre gens de bonne compagnie. L'Ordre Sith n'accueille pas que des fous sanguinaires adeptes prônant la violence comme seule alternative... N'avez-vous jamais eu l'occasion de converser avec eux autrement que sabre à la main? »

« - Voyons... Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de converser sur un champ de bataille, mais c'est relativement complexe. Plus sérieusement, si vous insistez, nos échanges ont été des plus rapides, avant d'en arriver à faire parler les armes. Certes, ma position dans le Temple, puisque vous semblez la connaître, n'aide guère, je ne suis pas foncièrement la meilleure personne pour vous assurer que tous les siths que j'ai croisé n'avaient pas une tendance charmante à la mégalomanie et à l'attaque sabre au clair. Mais vous semblez bien renseignée, alors dites-moi, avez-vous en tête des adeptes du côté obscur qui n'ont pas fini par sombrer dans la démence? Le côté obscur est un cercle vicieux, une pente glissante, d'où mon scepticisme sur le sujet. »

« - Une pente glissante, un cercle vicieux... Un dogmatisme. Quoi de mieux pour répondre aux idées arrêtées que d'autres idées arrêtées. Je connais les Ténèbres, pas moins de huit ans que je navigue sur cette mer sombre et... Ils n'ont jamais su répondre à vos dogmes que par les leurs... La réflexion est-elle si dangereuse à la société que chacun semble ainsi la fuir? »

« - La réflexion ne s'accompagne-t-elle pas de démonstrations empiriques? Navrée de vous contredire, mais la nature du côté obscur amène sur cette fameuse pente glissante. Ce n'est pas du dogmatisme. C'est un fait. Je pourrais citer des dizaines d'exemples célèbres, je crois que vous n'en avez pas besoin. A partir du moment où vous vous abandonnez à quelque chose qui prône la recherche absolue du pouvoir, et peu importe ce qu'on utilise comme prétexte pour le camoufler, les conséquences seraient funestes. Vous connaissez les Ténèbres? Nous les connaissons tous. La différence réside dans le fait de les utiliser ou non.

Enfin, si je puis me permettre, ce n'est pas parce que l'on croit dominer quelque chose qu'on peut se l'assurer. C'est sans doute là une nuance de taille. »


« - Ma chère, voyons, n'avez-vous donc pas encore compris que tout cela, toutes ces règles, toutes ces allégories ne sont que des paraboles ne désignant qu'un seul arbitre : la nature du vivant ? Dites-nous simplement, clairement, si vraiment le Côté Obscur, ce monstre à trois têtes, était capable de dévorer ainsi ses adeptes, de les détruire, de les enchaîner sur son chemin, pourquoi le Côté Lumineux n'est-il pas capable de l'effet inverse ? De renforcer les convictions, de permettre à ses garants de se protéger de... Cette pente glissante ? »

Je penche la tête sur le côté, espérant trouver dans mon interlocutrice un peu plus de répondant et moins de vanité.

« - Allégories? Paraboles? Voilà une manière intéressante de répondre sur du factuel, mais je gage que la théorie est plus réconfortante que la triste réalité. Enfin, si vous tenez à aller sur ce terrain-là, soit.

La Force ne prend pas parti. Tout dépend donc de la manière de l'utiliser, de la concevoir. Alors non, règles, codes, tout ce que vous voulez, ne désignent pas la nature du vivant: ils en désignent une conception, différence de taille.

Ce sont ces conceptions qui répondent à votre dernière question. Partir de quelque chose qui considère la Force comme un moyen, un simple outil, ne peut amener qu'à une volonté d'aliénation, car les germes en sont contenues dans son essence même. La différence avec le côté lumineux se situe là: conçue comme un tout, à appréhender, à penser, la Force peut guider, certes, mais à la fin, elle ne peut contraindre. Nous sommes des êtres libres, dont les actes penchent sans cesse d'un côté ou de l'autre de cette balance.

En soi, c'est pour ça que le Code jedi existe. Pour décrié qu'il soit, il permet de se fixer un cadre de vie afin de permettre une meilleure compréhension de la Force, et de soi. Il n'est pas monolithique, et offre des pistes de réflexion. Mais à la fin, lorsque vous êtes confrontés à un choix crucial, vous devez décider, faire pencher la balance.

La nature du vivant n'est pas figée, ni une. La Force la façonne, et nous la façonnons à travers nos actes. »


« - Vous parlez du Côté Obscur comme si vous le connaissiez... Croyez-vous réellement qu'il est un genre de monstre capable de prendre le contrôle de l'esprit de ses adeptes ? Croyez-vous par ailleurs que c'est du Côté Lumineux qu'a découlé le Code Jedi ? Sérieusement, avons-nous l'air si mégalomane ? Si corrompue... Nous sommes sûrement plus sévèrement attachées à notre Code que vous au vôtre. N'arrivez-vous donc pas à le concevoir ? Pourquoi la Force devrait-elle être douée d'une conscience dépassant la nôtre. Pourquoi, au fond, ne serait-elle pas un catalyseur ? Rendant le désordre plus désordonné encore et incitant l'ordre à s'ordonner davantage, les deux natures appartenant au vivant, les deux natures s'opposants continuellement, et nous qui cherchons là-dedans un équilibre. »

Quelle chose étrange que la recherche désespérée de réponses que je sais déjà qu'elles me laisseront insatisfaite ou du moins sceptique.


|:. HrP .:| - | Le dialogue ci-dessus a été réalisé par les quatre petites mains des joueurs de ce sujet. | - |
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Depuis le début, Alyria se demandait bien ce qui l’avait amené à entreprendre un dialogue philosophique sur la Force avec une adepte de l’Obscur –puisqu’il n’y avait pas de doute là-dessus-, chose à laquelle elle n’était guère habituée, pour faire dans l’euphémisme. La femme s’exprimait bien, pas de doute là-dessus, mais la trentenaire commençait à sentir poindre un très léger agacement devant ce qu’elle considérait comme une déformation constante de ces propos. C’était comme si son interlocutrice voulait absolument s’assurer qu’elle avait raison, une manière de se conforter sans doute. En tout cas, c’était comme cela qu’elle le percevait. Pourtant, elle avait l’impression que cette étonnante recherche de réponses pouvait mener à quelque chose de bien plus intéressant. Cependant, il allait falloir se mettre d’accord à un moment donné sur un fait précis : à ce rythme-là, elles allaient enchaîner des accusations policées sans guère avancer. Et ce ne serait pas, mais alors pas du tout productif.

Inspirant profondément, Alyria répondit d’une voix qui se voulait mesurée :

« Je crains que vous ne déformiez légèrement mes propos. Ai-je dis que le Code jedi découlait directement du Côté lumineux ? Non. Il tente de s’en approcher le plus possible, nuance. Deuxièmement, toute personne sensible connaît le côté obscur, ce qu’il représente, comme le côté lumineux d’ailleurs. Pour le reste… Avez-vous déjà essayé de méditer, je veux dire réellement, profondément, de vous laisser envahir par la Force sans aucune volonté de l’utiliser, seulement de la comprendre, de la laisser vous imprégner ? Il n’y a pas de meilleur moyen d’appréhender la nature vivante de la Force. Du reste, la Force est un équilibre, pas nous. »

" - La pratique de la méditation m'est effectivement familière. Cependant, là où vous pensez étudier la Force, je pense étudier le monde à travers un "autre sens" que le sens commun. De la même façon que la vue permet de découvrir les couleurs, une sensibilité à la Force permet de découvrir une autre composante de notre monde. Le "Côté Lumineux" - qui selon moi n'est qu'une création de notre esprit - n'est en fait que l'ensemble des mouvements que nous percevons menant à la vie, tandis que le "Côté Obscur", sont tous les mouvements menant à la mort, la disparition. Le monde, ne pouvant n'être que vie, nécessite la présence de ces deux opposés. 


Cependant, malgré des conceptions divergentes, je vous rejoins sur un point : l'équilibre. C'est ce que j'étais venu chercher ici... En vain. J'ai besoin d'un nouveau Maître. D'un nouvel accès au savoir. De pouvoir raviver les flammes que l'on m'a, depuis toujours, appris à éteindre. "
 

La réponse ne tarda pas, cependant, Alyria, pour la première fois depuis le début de cette étonnante conversation, eut l’impression d’avoir une minuscule ouverture pour tenter de comprendre un peu mieux d’où venait son interlocutrice mystère. Elle avait eu raison sur un point : cette volonté de réponses qui semblait l’animer. Mais pour réussir à lui en donner, il fallait qu’Alyria comprenne son point de départ.

« Nous voyons simplement le monde avec sa composante cachée aux yeux de la plupart des êtres vivants, nous en observons la matière première, vivante. C’est vrai, la vie ne peut advenir sans la mort, c’est le cours naturel des choses. Mais il y a une différence saisissante entre provoquer la fin d’un cycle et attendre sa fin normale. »

Puis elle ajouta sur un ton neutre :

« Peut-être que si vous m’expliquez la pensée que l’on vous a enseigné et ce que vous jugez inadéquat, je pourrais vous aider, dans la mesure de mes capacités et des limites inhérentes à certaines de nos différences. »

La voix sous le masque se fit plus hésitante et, même si la filtration semblait faire oublier la plupart du doute, les pauses marquées entre chaque idée ne laissaient aucune place au doute.



" - Les... Divergences que j'ai observé avec l'enseignement de mon ancien Seigneur ne sont pas de l'Ordre des prémices, mais plutôt des extensions résultants de ces prémices. Nous ne sommes pas... D'accord avec l'application. Il ne sert à rien de chercher à faire fuir le Désordre par l'usage sans cesse plus massif du Côté Obscur. Mon Seigneur n'est pas... Malveillant, ni même intéressé. Nous partageons juste avec lui une vision moins conciliante que la vôtre. S'Il en possède le Savoir, Il s'est toujours refusé à le partager avec nous. Nous voulons apprendre à générer la Lumière aussi bien que nous sommes capable d'apporter l'Ombre. Vous comprenez ?



L'Ordre Sith n'est qu'un ramassis d'idiots qui s'imaginent prédateurs là où ils ne sont que proie, proie à leur propre inconstance et à leur propre stupidité. Il est inutile que je me tourne vers eux. C'est la Paix que je trouve en ces lieux qu'il me faut apprendre à côtoyer. "


Un long soupir. Il était clair que la jeune femme était en plein trouble mais qu'elle n'était pas non plus susceptible de renier ses certitudes premières.
 

Voilà qui était pour le moins intéressant… Et assez troublant. Si Alyria devait résumer, elle se trouvait avec un seigneur sith désirant apporter l’ordre, concept abstrait s’il en était. Mais tout en utilisant le côté obscur, ce qui était un peu paradoxal effectivement. Et une apprentie qui, sans renier son héritage obscur, voulait en apprendre plus sur le côté lumineux. La situation était quelque peu épineuse pour la jedi, qui voulait éclairer son interlocutrice sans forcément renforcer une ennemie potentielle.

Prudemment, elle demanda :

« Je ne peux que vous encouragez dans la voie de la découverte de la voie lumineuse, peut-être qu’elle vous apportera plus que ce que vous aviez à présent. Mais une question me taraude : depuis le début de notre conversation, vous parlez beaucoup d’ordre, de désordre… Des concepts vastes, qui peuvent se relier à beaucoup de choses. Alors, simplement : pour vous, qu’est que l’ordre dans cette galaxie ? Qu’est-ce que le désordre ? »

HRP:
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La question me fait sourire mais Maître Von ne peut rien en voir. Elle est si vaste. Elle me demande de dévoiler les piliers de mon éducation et de mes croyances alors même que mes jambes commencent à s'ennuyer de se balancer.

« - Et si nous marchions de concert ? Vous me posez là une question qui appelle une réponse bien longue et nous craignons que ce laïus, aidé par le soleil et l'air agréable, ne vous pousse au sommeil. »

Le Maître quitte sa branche, dévoilant une maîtrise pointue de son corps jusque dans le plus simple de sa gestuelle.

« - Comme vous voulez. De toute façon, cette pauvre branche devait commencer à fatiguer sous nos poids combinés. Mais ne vous inquiétez pas, il y a peu de risque que je m'endorme au milieu d'une telle conversation, surtout quand vous piquez ma curiosité ainsi. »

Il est étrange mais néanmoins extrêmement plaisant de découvrir dans cette situation tout le raffinement que nous avons l'habitude de côtoyer par ailleurs. Les rares fois où il m'a été imposé de me glisser parmi les Siths se sont toujours soldées par un bilan lamentable sur leur savoir vivre. Quand bien même, parfois, ils tentent de se donner une certaine contenance, ils tombent toujours irrémédiablement dans une espèce de pastiche maladroit et terriblement disgracieux. L'Ordre Jedi, avec lequel nous avons pu avoir quelques brefs contacts par le medium du Chancelier Suprême Arnor, dispose au moins de cette vertu indéniable qu'est l'urbanité.

Je me laisse glisser doucement, abandonnant perchoir, dossier et bain de soleil, et retombe souplement sur le sol herbeux. Sans les toucher, d'un mouvement de la main, j'invite les gardes chromées à gagner leur place à ma ceinture.


« - N'y voyez pas de défiance à votre égard, Maître Von ; vous comprendrez simplement que ce sont là le genre de bibelots qu'il ne vaut mieux pas laisser traîner n'importe où. »

Dans la relation à autrui, l'humour est un catalyseur efficient. Cette fois, je me dirige vers l'extérieur de l'Enclave, proposant implicitement que nous en fassions le tour. Le couloir qui mène aux terrasses est court et nous avons tôt fait de le traverser en silence, lentement. Ce n'est qu'une fois le seuil franchi et nos idées agencées que nous nous lançons dans notre exposé, déployant notre pensée d'un ton calme et posé, habilement accentué pour ne pas lasser l'oreille de Maître Von sans pour autant lui paraître véhément.

« - Notre pensée part d'un constat simple sur le vivant. Lorsqu'un être vient au monde, ce dernier est prédestiné à remplir un rôle, une fonction, dans un ensemble interconnecté que nous désignons comme « Cosmos ». Ce rôle est déterminé par deux grands Absolus devant lesquels l'individu ne peut rien : la Nature et la Société.

D'abord, la Nature dote l'individu de certains attributs – puissance physique, intelligence, sensibilité à la Force – lesquels attributs lui permettent de coïncider avec l'un ou l'autre des rôles défini, quant à lui, par la Société – à l'extension sémantique la plus large possible à savoir toute organisation d'êtres pensants. »


Un discours efficace est un discours qui permet sa compréhension et cette dernière est bien plus aisée quant au concept est adjoint une image, un exemple, une allégorie. Une légère pause, le temps d'admirer le vol décroissant d'un grand oiseau se posant non loin de nous, et la parole se fait de nouveau entendre.

« - Ainsi, jamais il ne sera envisagé, dans les normes actuellement établies par l'Ordre Jedi, de nommer Grand Maître Jedi un être non-sensible à la Force puisque la Nature n'aura pas pourvu à cet individu l'attribut qu'exige de lui la Société . »

Nous avançons au rythme de la pensée dans les jardins du pourtour de l'Enclave. Les grandes dalles sont couvertes de mousse, de feuilles, de racines et de petites fleurs parviennent à s'immiscer au cœur des joints, usées par les intempéries. L'extérieur du complexe ne bénéficie pas de la même atemporalité qu'en son sein.

« - De là, nous partons du principe que l'être pensant dispose de deux alternatives : la Sagesse ou l'Orgueil. La Sagesse mène à accepter sa propre nature, à s'inscrire dans la Société de façon adéquate et, de fait, à engendrer l'Ordre. La voie de l'Orgueil conduit, quant à elle, l'individu à nier ce qu'il est et de ce fait à vouloir s'introduire violemment dans un rôle pour lequel il n'est pas destiné. En conséquence, incapable de remplir la fonction qu'il s'est accaparé, il fait naître le Désordre. Imaginez deux secondes ce que serait la République si vous placiez à sa tête un homme atteint de schizophrénie. Bien sûr, nous ne faisons là qu'esquisser les grands traits d'un système de pensées abouti.

L'Orgueil peut être aussi de s'imaginer pouvoir vivre en ne retirant que le bénéficie de la Société. Un consommateur régulier de narcotiques, par exemple, dont le vol et la violence sont les seuls pratiques, uniquement capable de dilapider son noir bénéfice dans ses doses de produits stupéfiants, est un vecteur de Chaos – autrement dit de Désordre. Un être particulièrement vain, qui se complairait dans la plus parfaite inactivité, se trouverait également orgueilleux en jugeant que la Société peut se passer de ses ressources.

Par ailleurs, la Société étant intrinsèquement singulière et sujette à la transformation, tandis que la Nature, elle, est nécessaire et immuable, il faut ajouter l'idée suivante à notre réflexion à savoir qu'un individu d'extraction modeste peut, légitimement, accéder à une fonction très prestigieuse dans l'éventualité où celui-ci aura été, comme il l'est dit familièrement, gâté par la Nature. En cela, les êtres sensibles à la Force, et notamment les Jedis, sont un excellent paradigme lorsqu'ils extirpent l'individu de son milieu social d'origine afin de le faire bénéficier d'une éducation adéquate afin qu'il occupe une fonction pour laquelle sa sensibilité à la Force l'a prédestiné. »


Le soleil de Dantooïne, comme en accord avec l'éclatante vérité de notre Idéal, à son zénith, resplendit de tous ses feux.

« - Ces Principes étant posés, il appartient aux Adeptes de l'Ordre de lutter contre les vecteurs du Chaos et de les éliminer au profit de tous afin de faire jaillir de cette lutte une société juste et profitable à chacun. La différencce entre vous et nous, avec tout le respect que nous éprouvons pour vous, réside dans le fait que nous assumions pleinement cette fonction qu'est la nôtre, avec toute son intransigeance, tandis que l'Ordre Jedi dans son ensemble ne cesse de laisser la Société souffrir des parasites qui la peuple au prétexte de distribuer sans relâche de naïves « secondes chances » et obéissant à des préceptes humanistes qui – selon nous – sont une autre manifestation de l'Orgueil. »

L'avance se poursuit tandis qu'un silence courtois signifie l'attente d'une réaction sous quelque forme qu'elle soit.
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Alyria regarda son interlocutrice la rejoindre et rengainer ses sabres, ce qu’elle ne commenta pas. Il fallait croire que l’apparente nonchalance de cette femme mystérieuse avait quelques limites… Amusant. Mais pour le moment, elle voulait avoir le fin mot de toute cette histoire, ou plutôt de toute cette pensée à peine esquissée. Après cela, elle aurait enfin un semblant de vision globale de ce dont elle discutait depuis plusieurs minutes maintenant.

Elle écouta donc sans mot dire l’explication, et ne fut pas déçue. Théorique, parfois pointue, mais jamais complètement absconse, l’énoncée en était clair, même si de là à la partager…

 C’était un pas qu’Alyria ne franchirait sans doute pas. En effet, la jedi n’était pas forcément une grande amatrice de conceptions aussi… absolues d’organisations sociales. Les années l’avaient rendu sur ce point plus pragmatique que certains de ses pairs, puisqu’elle avait une expérience du terrain certaine, allié à un goût évident pour la politique qui lui avait fait dévorer une bonne partie des traités du Temple de théorie politique. Or, c’était précisément ce qui manquait dans la vision présentée : l’Etat, ce grand absent. Sans compter que cet aspect de prédestination en aurait gêné plus d’un. Oui, en un sens, c’était le caractère parfaitement absolu de ce modèle théorique qui la gênait, et non sa construction intellectuelle en elle-même. Après tout, elle comprenait l’intérêt de se reposer sur une théorie qui, englobant tout dans un idéal parfait, rendait la réflexion plus facile, car oubliant la réalité.

Sentant qu’elle devait maintenant répondre, Alyria commença par une tactique pour le moins traditionnelle en rhétorique : la demi-approbation, ce qui signifiait concrètement ne pas rentrer directement dans l’affrontement.

« Je dois reconnaître que votre pensée a le mérite d’être formidablement structurée des plus intéressantes, intellectuellement parlant. »

Manière polie de complimenter la logique de son interlocutrice tout en soulignant poliment qu’on ne la partageait pas vraiment.

« En effet, cette théorie a un caractère particulièrement… total. A vous entendre, chaque être vivant aurait une place prédestinée à sa naissance et ne pourrait y échapper… Une sorte de destin en somme, dicté par ce qu’il est et une entité toute puissance définissant les rôles sociaux. Or, nous avons là un premier problème que j’aimerais relever : certes, si certains individus naissent avec des caractéristiques particulières comme une sensibilité à la Force, c’est à eux d’en faire quelque chose. Tous les jedis n’accomplissent pas les mêmes choses, et nos choix peuvent être en partie guidés par nos capacités premières, mais aussi et surtout par nos goûts personnels, nos appétances, et tout simplement des traits que nous développons sans forcément avoir une prédisposition pour cela. Nul n’a un code génétique qui le programme intégralement : nier la capacité d’un être à obtenir des savoirs qu’il n’a pas à la naissance, et vers lesquels il ne se serait pas tourné de prime abord, c’est nier tous les effets de la culture et de l’enseignement. Nul besoin d’être d’une intelligence particulièrement extraordinaire pour devenir un historien exceptionnel, ou un xeno-biologiste renommé : le travail et la détermination conditionne beaucoup plus la réussite.


Alors, certes, certains individus naissent au mieux avec des facilités, mais peuvent d’une part exceller dans un domaine pour lequel ils ne sont pas initialement au-dessus de la moyenne, ou bien manquer de la créativité nécessaire pour être réellement doué… Cantonner les personnes à un a priori me semble négatif, puisque vous vous privez d’individus qui aurait pu faire des étincelles dans un autre domaine, simplement parce que ce dernier leur aurait beaucoup plus plu. Alors oui, vous me parlez d’individu gâté par la nature, pour vous citer, qui pourraient s’élever au-dessus de leur condition première. Mais on en revient à ce que je disais auparavant : vous pouvez avoir des capacités qui ne sautent pas aux yeux, ou qui se révéleront avec le temps, les études et la patience.


Un deuxième point me semble important à relever, et non des moindres. Dans votre démonstration, quid de l’Etat ? Mieux, qui déciderait des rôles attribués aux individus ? Quels organes institutionnels ? Et enfin… Avec qui à sa tête ?


La société ne peut se régir seule, elle a besoin d’institutions pour le faire, et nulle part dans votre discours vous n’en faites mention. N’y a-t-il pas une distorsion importante ici entre théorie pure et réalité du fonctionnement des peuples, tout simplement ?


Enfin je présume que votre « maître » serait à la tête de tout cet échafaudage, je me trompe ? Quelle manière intéressante de justifier une volonté de pouvoir personnel par la place accordée à chacun, quand personne ne peut juger de vos propres capacités, puisque vous vous arrogez le droit de juger les autres… »

La petite pique de fin n’était destinée qu’à réveiller qu’un sens critique chez son interlocutrice, mais contenait également une vérité évidente.

« Un dernier point : donner des secondes chances n’est pas idiot, c’est reconnaître simplement la capacité d’une personne à changer de vie quand on lui en expose les travers, et qu’elle les comprend. Certains en sont capables, d’autres pas, car c’est un travail difficile, mais pas impossible. Votre toxicomane, qu’est-ce qui l’a mené sur cette pente ? On ne nait pas avec une addiction aux épices, que je sache. En revanche, un milieu peu favorable et des conditions de vie difficiles peuvent vous faire basculer sur un mauvais chemin : était-ce votre destin irrémédiable ? Non, parce que, si cette personne avait croisé une personne prête à l’aider auparavant, elle n’aurait peut-être jamais commencé sa consommation.


Au fond, si je comprends bien, vous êtes semblable à cette personne, sans vous offenser : vous cherchez une autre voie que celle à laquelle le hasard de la vie vous a conduit, et voulez une chance de changer. N’est-ce pas la preuve que tout conditionnement, toute volonté ancrée, peut se modifier, et que les êtres méritent d’être jugés selon leurs choix, ce qu’ils accomplissent si on leur en donne l’opportunité ? »
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Il serait pourtant si facile de transmettre directement le bloc de nos idées à l'esprit de Maître Von à la façon d'un réseau informatique. Aucune perte de données, aucune incohérence, et surtout aucune interférence avec d'autres données latentes telles que les préjugés ou les valeurs. Le langage, loin d'être un outil de communication fiable est en réalité une véritable barrière, un champ de mines où chaque mot se prête – presque avec une joie sordide – à sur-interprétation sauvage.

Face à un tel Chaos langagier, nous nous sentons presque désespérée de pouvoir un jour instaurer l'Ordre dans cette société d'individus balbutiants. Comment pourrions-nous nous trouver d'accord si nous ne sommes pas en mesure de nous faire comprendre ? La Fin justifie que l'on tente de passer outre.


« - Afin que nous nous comprenions au mieux, nous tâcherons de reprendre point par point votre réponse – que nous admirons comme étant révélatrice de votre génie, votre réputation et tout à fait justifiée, Maître Von – et de donner à chaque argument son contre point. »

Nous laissons une pause suffisante afin que mon interlocutrice aie le temps de donner son assentiment muet à un tel procédé. La scène nous fait sourire sous notre masque. Nous étions là à palabrer sur les fondements d'une philosophie avec, quelque part, ce qui est un avatar de son fondateur, ou du moins de ce qu'il a un jour été. Nous voilà chantre de son Idéal, l'héritière de son Génie. Une sensation étrange nous gagne ; nous prenons conscience que le silence s'est installé bien plus qu'il ne l'est nécessaire et que nous l'avons souhaité sous le soleil de Dantooïne. Nous avançons toujours doucement. Notre sincérité est accueillie par un sourire qui nous semble aussi honnête que ce qui l'a fait naître. De ce spectacle ravissant, une paix tranquille émane, paix que nous devinons issue de l'aura lumineuse que dégage notre vénérable interlocutrice, aura que nous n'avons jamais connue chez notre Seigneur.

« Nul besoin de flatteries. D’autres que moi auraient répondu d’une bien meilleure manière. Et étant donné votre propre argumentation, je me verrais contrainte de répondre par d’autres compliments, et je crains que nous ne commencions à tourner en rond dans un concert de louanges. Enfin, faites, je vous en prie, je suis curieuse d’entendre un approfondissement de votre pensée. »

Nous ne faisons pas plus attendre la Maître Jedi qui se présente comme prête à écouter avec attention notre propos.

« - Vous avez commencé fort pertinemment par aborder le sujet de la « prédestination ». Nous commencerons par reconnaître notre faute. Lorsque nous avons employé ce terme, nous l'avons fait de façon inadaptée. En réalité, nous envisageons plutôt une prédisposition naturelle à s'épanouir dans telle ou telle discipline, telle ou telle voie. La Nature – car vous ne pouvez nier que tout organisme vivant est malgré lui dirigé à l'occasion par quelques instincts sous-jacent (Auto-conservation, reproduction, protection des semblables) – par le hasard des croisements ADN distribue ses dons et il n'appartient alors qu'à l'individu de les cultiver. Vous admettrez que, naturellement, un enfant sera bien plus heureux d'accomplir des actions réalisables pour lui, en adéquation avec les dons innés dont il semble doté. Personne n'aime ne rencontrer que frustration et échec, jamais un wookie n'ira s'obstiner à essayer d'apprendre à voler lui qui ne dispose naturellement ni de plumes, ni d'ailes, ni de membranes telles qu'elles pourraient l'amener à défier la gravité. Est-ce vous d'accord sur ce premier point ? Ou du moins nous sommes nous à ce point clarifiées que vous parveniez à saisir notre point de vue ? »

« J’ai sans doute dû mal m’exprimer également. Je ne nie pas que les individus naissent avec certaines aptitudes naturelles, mais je pointe simplement du doigt le fait qu’une société a besoin de bien d’autres choses pour fonctionner qu’une simple force physique ou une certaine agilité d’esprit. Personne ne naît avec une profonde appétance pour le code du commerce galactique, par exemple. Ou alors je n’ai pas rencontré de personnes avec une telle prédisposition. Certaines aptitudes nécessaires à une organisation de la vie galactique s’acquièrent par l’étude, le travail, et cela relève de choix personnels plus que de dons à la naissance. A mon sens, nos deux points de vue se complètent plus qu’ils ne s’opposent. Je comprends parfaitement votre point de vue, j’y apporte simplement un point de complément, qui, je l’espère, vous semble adéquat. »

Vraiment, cette femme est surprenante. Nous ne nous souvenons pas d'avoir entendu Darth Deïnos vanter les mérites d'une ouverture d'esprit Jedi et pourtant Maître Von témoigne de son existence de façon indubitable. Est-elle un élément représentatif de la masse?

« - Bien entendu, il faut dissocier ici l'inné de l'acquis. La Nature donne le goût des chiffres, l'affection des lettres, la passion de l'art, le génie créateur, la société ne fait que proposer des « domaines d'application » de ces caractères premiers dans lesquels l'individu sage décidera ou non de s'investir. Qu'un individu soit doué pour les nombres ne l'amène pas nécessairement à faire carrière dans la recherche fondamentale mathématique, seulement son esprit logique s'épanouira plus aisément dans la comptabilité que dans l'archéologie ou l'étude des langues anciennes. La voie qui s'offre à un individu n'est pas unique, elle est une série de choix, de compromis entre sa nature et la société. Nous comprenez-vous ? Pouvons-nous allez plus avant selon ses principes, Maître Von ? »

« - Faites je vous en prie. »

« - Suivant votre logique, vous avez ajouté ceci : « Or, nous avons là un premier problème que j’aimerais relever : certes, si certains individus naissent avec des caractéristiques particulières comme une sensibilité à la Force, c’est à eux d’en faire quelque chose. Tous les jedis n’accomplissent pas les mêmes choses, et nos choix peuvent être en partie guidés par nos capacités premières, mais aussi et surtout par nos goûts personnels, nos appétences, et tout simplement des traits que nous développons sans forcément avoir une prédisposition pour cela.. ». »

C'est une citation exacte de la séquence sémantique du Maître Von. Nous en avons conscience. C'est une pratique qui nous est naturelle mais que nous avons pu constater comme peu commune. Non content de se laisser aller aux méandres de l'interprétation des mots, ils trouvent également drolatique de noyer d'autant plus le sens qu'il le perde dans un espèce de résumé approximatif de leur cru des propos qu'ils ont entendus. Si les journalistes et les politiques incompétents sont férus de ce genre de déformation, d'entorse et de mise hors contexte des paroles de chacun, l'Ordre veut que seule l'exactitude soit tolérée. Si opposition il devait y avoir, elle devait être logique, honnête et construite en vue de souligner les erreurs véritables de l'interlocuteur et non sur des falsifications. Les débats qui ne sont pas de cette nature ne sont pas plus satisfaisants que les disputes d'enfants.

« - Nous vous proposons de résumer cette idée ainsi : vous considérez que chaque individu dispose d'un libre-arbitre. En est-il ainsi, Maître Von ? »

« Je pense que nous posons des actes, des choix, en fonction de paramètres qui nous sont propres. N’y a-t-il pas des circonstances qui peuvent cependant obscurcir ce jugement, cette liberté ou l’orienter pour le meilleur ou pour le pire ? C’est également évident. Voilà ce que je considère. Lorsque l’on s’aventure dans des terrains aussi théoriques que la nature des êtres peuplant notre galaxie, je crains qu’utiliser des résumés, ou des raccourcis, ne soit guère approprié. Mais je pense que vous avez parfaitement compris ce que je voulais dire. »

« - Certes, le choix est influencé par de nombreux facteurs, mais reconnaissez-vous que ces facteurs – passifs ou actifs, naturelles ou factuels – ne sont pas la suite logique de laquelle découle un choix qui serait nécessaire face à ces facteurs et que le sujet dispose d'un libre-arbitre transcendant la réalité à laquelle il est soumis, ou bien penchez-vous pour une absence de liberté du sujet qui serait, sans le savoir, en réalité totalement programmé en sorte que les choix qu'ils feraient ne seraient qu'une illusion et ne seraient que la condition logique d'un millier ou plus de chaînes de causalité dont il ne parviendrait pas à défaire les liens ? »

« Je pense que nous posons des actes, des choix, en fonction de paramètres qui nous sont propres. N’y a-t-il pas des circonstances qui peuvent cependant obscurcir ce jugement, cette liberté ou l’orienter pour le meilleur ou pour le pire ? C’est également évident. Voilà ce que je considère. Lorsque l’on s’aventure dans des terrains aussi théoriques que la nature des êtres peuplant notre galaxie, je crains qu’utiliser des résumés, ou des raccourcis, ne soit guère approprié. Mais je pense que vous avez parfaitement compris ce que je voulais dire. »

« - Certes, le choix est influencé par de nombreux facteurs, mais reconnaissez-vous que ces facteurs – passifs ou actifs, naturelles ou factuels – ne sont pas la suite logique de laquelle découle un choix qui serait nécessaire face à ces facteurs et que le sujet dispose d'un libre-arbitre transcendant la réalité à laquelle il est soumis, ou bien penchez-vous pour une absence de liberté du sujet qui serait, sans le savoir, en réalité totalement programmé en sorte que les choix qu'ils feraient ne seraient qu'une illusion et ne seraient que la condition logique d'un millier ou plus de chaînes de causalité dont il ne parviendrait pas à défaire les liens ? »

Nous sommes agréablement surprise de constater la capacité du Maître Von à ne céder aucun pouce de terrain. Jamais elle n'acquièsce tout à fait, jamais elle ne s'oppose totalement. De façon consciente ou non, elle parvient chaque fois à se glisser hors des mailles de la rhétorique que nous tentions de refermer sur elle. Cette rencontre nous ravit déjà tout à fait alors que nous en sommes qu'à ses prémisses.

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Alyria devait reconnaître que question rhétorique, son interlocutrice savait y faire. Toujours apte à trouver la faille, à reformuler l’argumentation pour qu’elle soit plus précise… En un mot, une anguille du verbe, ou un bloc de pensées parfaitement organisées qui ne laissait guère de prise à une version contradictoire. D’ailleurs, la maîtresse d’armes ne s’opposait pas forcément frontalement, préférant nuancer plutôt qu’attaquer.

« D’une certaine façon, votre conception de la capacité d’un individu à faire des choix librement est binaire : en un mot, il l’a, de manière absolue, quand bien même certains facteurs pourraient l’influencer, ou bien il ne l’aurait pas, et lesdits facteurs sont alors les réels décideurs. Pourtant, si je n’ai pas utilisé ce terme que vous réemployez de libre arbitre en répondant, c’était pour une raison fondamentale : cette volonté de ne voir que deux solutions forcément antagonistes à un problème, je ne la partage pas. La liberté d’un individu n’est pas transcendante, elle est soumise, en effet, à de nombreux facteurs extérieurs, issus de la société, de l’environnement physique, ou simplement de son caractère. Pourtant, confrontés à un même choix, dans les mêmes conditions, deux personnes singulièrement identiques, avec des formations similaires, vont souvent poser des choix différents. Nous avons là, en quelque sorte, une question de degré : sommes-nous libres d’une manière parfaite, transcendante, absolue ? Sans doute pas. Sommes-nous pour autant voués à suivre un chemin tracé par des éléments que nous ne contrôlons pas ? Pas pour autant. Pardonnez cette réponse un peu longue, voire légèrement verbeuse. C’est qu’en de tels questionnements, je ne crois guère en la simplification excessive, car elle amène bien souvent les êtres à oblitérer toute idée de gradation dans une conception. »

« - Veuillez excuser notre trop plein de vulgarisation. Il est vrai que nous simplifions à l'extrême un débat dont nous pourrions faire une oeuvre de mille et mille pages afin de donner au discours le ton et la légèreté de la conversation. Partons donc de ce principe, auquel j'adhère, que l'individu, plongé dans le monde, se voit à effectuer des choix selon une contrainte plus lourde ou plus légère en fonction des situations. 

Dans ce cadre, celui que nous désignons comme un Sage est un individu qui, ayant fait l'effort de se connaître lui-même et de connaître les autres, va, en fonction de ses capacités innées et de ses goûts, s'inscrire dans la société de façon à s'y épanouir de la meilleure des manières et, par extension, faire gagner la société en richesse. Son opposé, l'Orgueilleux, est son exact opposé. Un homme qui, pour une raison ou pour une autre - méconnaissance de soi, de la société, par exemple - va s'introduire dans la société avec violence, dans une fonction, une place qui ne lui correspondra guère et que, de fait, il ne saura remplir. De là, découlera un mal pour la société dans son entièreté et un bénéfice illusoire pour l'individu qui ne s'accomplira guère, même s'il pourra en retirer quelques basses satisfactions comme l'argent ou le pouvoir. 

J'avance cela en réponse à votre opposition concernant l'impossibilité, dans notre Idéal, pour un individu "de faire des étincelles". Bien au contraire, nous encourageons tout à fait l'expression du génie en quelque domaine qu'il fût. »

L’idée était intéressante, Alyria n’allait pas dire le contraire, l’idéal était toujours séduisant. Mais son côté pragmatique n’allait pas manquer de ressortir. C’était dans son expérience du terrain de chercher les manières dont les pensées pouvaient s’appliquer concrètement, après tout.

« J’entends bien votre argument d’une société ordonnée, qui tire pleinement partie des compétences de chacun des individus la composant. Un noble idéal, s’il en est. Cependant, je ne sais s’il est possible de se connaître si bien très jeune. Je veux dire, quand estimez-vous faisable le choix de la place légitime dans votre société ? Trop jeune, nous ignorons souvent une partie de notre potentiel, et ce pour des raisons évidentes : manque d’expérience, de maturité, ou tout simplement impossibilité d’avoir eu accès à des éléments permettant de prendre connaissance d’une voie que l’on ignorait jusqu’à maintenant. Trop âgé, nous nous fermons certaines portes, par peur de ne pas être capable d’être à la hauteur… En somme, un équilibre bien complexe à trouver par les individus eux-mêmes pour aboutir à cet ordre que vous décrivez.

Il faudrait donc que des individus extérieurs décident, en fonction des données qu’ils ont pu recueillir, du devenir de chaque personne. Tâche peu aisée, et particulièrement large, subjective qui plus est. Comment donc mettre en place un tel fonctionnement ? Avec quelles règles, quels procédés ? 

Pardonnez ces questionnements purement pragmatiques, mais j’ai souvent remarqué que la déconnexion entre la théorie et la mise en place des idées étaient souvent néfastes à l’exposé clair d’une volonté, quelle qu’elle soit, et aussi respectable qu’elle puisse être. »

Le ton se fait entendre clairement amusé.

« Sauf votre respect, Maître Von, qu'une Jedi qui accepte sans sourciller que les enfants soient retirés à leurs familles respectives dès leurs premières lueurs de raison trouve quelque peu choquant le fait que nous envisagions de généraliser le procédé nous amuse beaucoup. Il n'est pas inenvisageable d'organiser l'éducation en sorte que les parents n'aient plus qu'un rôle purement affectifs à jouer dedans. Les enfants seraient pris en charge en internat dès leur plus jeune âge et chacun serait soumis d'abord à une éducation de base à portée générale, afin de ne lui fermer aucune voie, avec en parallèle une formation culturelle et créative, afin d'inviter leurs esprits à user d'imagination. Enfin, au fur et à mesure que les compétences et les appétences de chacun se dessineraient davantage, un compromis serait trouvé et une formation de plus en plus spécifique proposée. La technologie pourrait sans peine pallier le manque d'enseignants ainsi que le traitement des informations propre à chacun. De tels systèmes existent déjà à moindre échelle ça et là dans la galaxie, et aucun, sinon ceux n'incluant aucune formation artistique et ayant pour but de promouvoir un pouvoir politique particulier dans l'esprit des élèves, ne semblent rencontrer de soucis particulier, bien au contraire. »

Ah on y était. Le point qui tombait fatalement dans toute discussion avec un jedi, à croire qu’au moment où les arguments ne suffisaient plus, on en revenait à cette attaque basique, ce cliché encore et encore remâché du jedi voleur d’enfant. Alyria était parfois fatiguée de devoir sans cesse se répéter sur ce sujet, d’expliquer patiemment à chaque fois que ce n’était pas par gaîté de cœur, mais bien dans une volonté de sécurité de tous, y compris de ses enfants au contrôle balbutiant mais aux pouvoirs déjà potentiellement dévastateurs. Mais plus que cela, elle était déçue d’entendre son interlocutrice s’abaisser à une telle remarque, elle qui prônait l’absence de préjugés au début de leur entretien.

Alyria fronça donc les sourcils avant de soupirer. Lorsqu’elle parla enfin après un assez long silence, sa voix se fit plus grave, plus tranchante.

« Il est également amusant de constater que toute discussion sur les jedis amène fatalement, dans une sorte de loi inéluctable, à entendre une réflexion sur la manière dont nous sommes conduits au Temple pour recevoir une formation. Le fait est qu’il y a une bonne raison derrière : la sécurité de tous. Les personnes sensibles à la Force, quand elles n’ont pas reçu l’enseignement adéquat, représente un danger pour leur entourage, et surtout pour elles-mêmes.

Sans cela, la nécessité absolue que tous subissent le même traitement semble difficile à mettre en place d’un point de vue pragmatique sur l’ensemble de la galaxie. Quand on voit les difficultés générées par une réelle motivation de sûreté générale, le résultat au nom d’une simple idée de la société idéale ne fait guère de doute à mon sens. Je dis cela sans discuter de vos propos d’un point de vue idéologique, mais en me basant sur un certain pragmatisme pur. Sur certaines planètes, je ne doute pas en effet que cela ne pose guère de problèmes. Mais la diversité galactique fait que je suis nettement moins sûre de la possibilité sur d’autres.

Du reste, je réitère ma question posée précédemment : quid de la hiérarchie politique ? Quelle organisation ? »

Notre main vient toucher du bout des doigts l'avant-bras de notre compagne de philosophie en signe d’apaisement.

« - Ne vous méprenez pas, Maître Von. Nous n'avons absolument pas critiqué le bien fondé de l'action du Temple Jedi. Nous comprenons tout à fait les motivations et la fin que le Conseil Jedi poursuit par cette pratique. Ce n'est en aucun cas au discrédit de l'Ordre que nous avons avancé cette boutade, mais bien pour vous souligner que notre pensée se rapproche intimement de ce principe de précaution, se contentant de l'étendre à tout à chacun. Il est tout à fait envisageable de fonder de grandes écoles de la République qui prendraient en charge les enfants dès leur plus jeune âge afin de pourvoir à leur éducation. Cela donnerait à chacun des chances égales de s'épanouir et annihilerait pour une grande partie l'influence des facteurs sociaux-culturels sur le comportement des enfants.

Par ailleurs, la forme du gouvernement ne pourrait être qu'approuvé par la masse des citoyens, sans quoi la révolte serait permanente et le chaos omniprésent. En cela, la République semble être un système fiable mais il est nécessaire de rendre la politique directe, de cesser l'intermédiaire des politiques corrompus qui y vont à grand coup de démagogie pour détourner l'argent du contribuable. Pourquoi ne pas considérer un gouvernement technocratique dont seul l'exécutif serait élu ? Ainsi, les lois proposées le seraient uniquement par des esprits compétents dans les différents domaines et le choix resteraient celui du peuple par l'intermédiaire de leurs droits de vote. 

Si ce système ne correspondait pas à la masse, libre à elle d'opter pour un système différent pourvu qu'il soit bénéfique à l'ensemble de leur société. »

Instinctivement, Alyria marqua un temps d’arrêt en sentant le contact physique de son interlocutrice, mais, préférant éviter un geste qui eut pu paraître méfiant ou blessant, essaya de refréner au mieux son mouvement de recul et écouta donc la dénégation de la femme mystérieuse. Voilà qui était joliment rattrapé. Peut-être avait-elle réagit avec un peu trop d’allant, mais il fallait avouer qu’à force d’entendre les mêmes critiques sur ce sujet précis, n’importe quelle personne finissait par avoir un sens de l’humour nettement limité en ce qui concernait cette matière. Quant au reste, maintenant qu’elle avait la vision d’ensemble, plus besoin de disputer. Ce qu’elle en pensait, après tout, n’avait pas grande importance. Non, maintenant, ce que la maîtresse d’armes désirait savoir, c’était pourquoi cette femme lui avait dit tout cela, et en fait, essayer tout simplement de comprendre plus avant ses motivations.
Alors après un temps de réflexion sur la suite à donner à cette discussion, elle déclara finalement :

« Je vois. Au moins maintenant, j’ai une vision plus claire de ce que vous défendez. Je ne dirais pas que j’en approuve l’intégralité, ce serait mentir et vous vous en doutez de toute façon, mais je peux en comprendre la logique et la construction. Cependant, à vrai dire, je présume que vous ne m’avez pas exposé cela longuement pour passer le temps sur Dantooine ou simplement faire la conversation. J’ai même la conviction que vous cherchez à vous prouver le bien-fondé de vos convictions, en me prenant à témoin. 

Est-ce à cause de ce Seigneur dont vous parliez tantôt, et des divergences qui vous opposent ? Quelles sont-elles, alors, pour vous pousser à deviser ainsi longuement avec un Maître jedi ? » 
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Drôle de hasard ou conclusion depuis toujours attendue par l'Ordre, nous venions de concert d'atteindre la terrasse haute de l'enclave. En pénétrant à nouveau dans le bâtiment d'ici, nous n'aurions qu'à suivre le couloir, croiser un nouvel arbre et descendre jusqu'à l'ancienne chambre du Conseil que nous avions visité plus tôt. Là, notre pensée pourrait trouver son parachèvement le plus éclatant.

« - Non, Maître Von, vous vous méprenez sur mes intentions. S'il est agréable de l'entendre, votre assentiment, même si mesuré, n'était pas la fin poursuivie par notre discours, ni même notre présence ici. »

Les portes s'ouvrirent d'un simple geste de notre main, simple effleurement du panneau de commande. Même âgée, la mécanique de ces lieux restait d'une perfection stupéfiante. Lorsque nous reprîmes notre marche, nous portâmes notre regard de jais loin devant, apercevant déjà les racines de l'arbre majestueux à travers l'orange brillant d'une interface virtuelle.

« Nous sommes tout à fait sûres de ce en quoi nous croyons. L'Harmonie, l'Ordre, la Paix et le Cosmos sont les quatre piliers d'une logique irréfutable et juste. Cette logique, qui demande à chacun abnégation et modération, notre Seigneur a cessé de la suivre, ou du moins le pensons-nous sans en avoir encore la certitude. »

Nous entrâmes à nouveau dans la lumière et contournâmes lentement ce témoin végétal d'un autre âge.

« - Nous n'avons à présent plus qu'une seule fin, une seule raison d'être, ramener à la Lumière cet esprit brillant qui s'est égaré, à force de porter seul le fardeau de sa Fonction. »

Nous étions revenues à l'ombre toute deux. Quelques pas encore et nous nous trouvâmes une seconde fois devant ce décor déliquescent qu'avait dressé pour les pauvres ères à notre image les Ombres.

« L'objet que nous poursuivons, Maître Alyria Von, n'est autre que votre enseignement. Que nous soyons, à votre exemple, à notre tour capable de faire disparaître la souillure d'un Côté Obscur que nous n'avons que trop côtoyé. »

Nous nous étions arrêtées, à la lisière de ce champ corrompu, avions posées un genou à terre et, suppliante, attendions que la lame tombât ou qu'une main compréhensive nous fût tendue.
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Alyria se trouvait dans une situation pour le moins délicate, et à vrai dire, inédite au regard de sa propre expérience. Tout au long de leur promenade dans les ruines de Dantooine, elle avait écouté avec attention son interlocutrice répondre à son ultime question. Que pouvait-elle en tirer ? A la fois beaucoup et trop peu d’informations.

Concrètement, qui que soit l’homme qui l’avait formé à la manipulation de la Force, ce dernier avait dû commencer comme tous les renégats à tenter de développer sa propre vision, puis à force de frayer avec les arts noirs, avait fini par se faire lentement corrompre par ces derniers, au point d’en oublier ses objectifs originels. La fameuse pente glissante dont la bretteuse avait parlé tantôt venait encore une fois de trouver un exemple, semblait-il, mais elle préféra garder cette réflexion pour elle-même : rien ne servait de retourner le couteau dans une plaie apparemment profonde pour le simple plaisir malsain d’avoir le dernier mot.

A vrai dire, à en juger par les qualificatifs très élogieux adressés à ce fameux « Seigneur », Alyria ne pouvait que contempler cette loyauté extrêmement profonde qui s’exprimait là. Cependant, cela allait évidemment l’ennuyer d’un point de vue éthique pour la suite de la conversation.

En effet, à sa grande surprise, la femme mystérieuse s’arrêta soudain, et se mot à genoux, dans une position de suppliante pour déposer sa requête : une formation. Et la maîtresse d’armes resta sans voix pendant un bon moment, ne sachant guère comment réagir.

D’un côté, il y avait une sincérité indéniable dans ses propos, elle pouvait le sentir à travers la Force, mais d’un autre… Etait-ce une ruse ? L’instinct d’Alyria lui soufflait que non, mais elle savait que face à une telle demande, mieux valait réagir avec raison et méthode. Sans compter que sa loyauté absolue envers ce Seigneur rendait la chose encore plus complexe. Et elle n’était pas au Conseil, ne pouvant évidemment prendre une telle décision ! La rédemption était-elle possible ? Peut-être, mais ce n’était pas à elle d’en juger. Tout au plus pouvait-elle faire un lien, mais son rôle devait s’arrêter là, et il fallait que quelques éléments soient mis au clair avant.

« Relevez-vous, je vous en prie, je n’ai pas besoin de vous voir en une telle position pour accéder ou non à votre requête. »

Cela dit, elle enchaîna :

« Chercher la rédemption est une noble voie, pour qui tente de trouver la Lumière avec sincérité. Vous savez que les jedis savent accorder le pardon à ceux qui désirent suivre ce chemin. Cependant, je ne puis en juger seule, je n’y suis de toute façon pas habilitée. Il vous faudrait passer devant le Conseil jedi, qui déciderait in fine de votre acceptation dans nos rangs. Je puis arranger une rencontre, néanmoins.

Cependant, je dois vous avertir de deux choses : la première est que les jedis n’acceptent pas toute personne clamant vouloir apprendre l’usage du côté lumineux dans leur rang, particulièrement avec un passé qui semble… chargé. Je ne doute pas de votre motivation, mais, à mon sens, pour y parvenir, vous devez désirer autre chose que simplement sauvez votre formateur. Cela doit être un engagement entier, personnel, vous comprenez ?

Et dans un second temps, de manière plus prosaïque : je ne sais rien de vous, pas même votre nom, ni votre visage. Décemment, je ne peux pas vous introduire face aux plus hautes instances de l’Ordre, surtout en cette période troublée sans aucune de ces informations. Je suis sûre que vous comprenez ce besoin de sécurité élémentaire. »

Puis, d’une voix plus douce, elle ajouta :

« Je ne sais pourquoi vous tenez tant à tenir votre identité secrète. Enfin, à vrai dire, j’ai bien une idée, tant l’explication paraît simple : peur d’éventuelles répercussions, des problèmes créés à des proches… Je me trompe ?

Si vraiment, la situation pouvait s’avérer extrêmement dangereuse, nous tenterions de trouver un arrangement pour satisfaire tout le monde, n’en doutez pas.

Je sais que ce genre de décisions n’est pas facile à prendre. Si vous ne souhaitez rien dire, eh bien… Je ne pourrais pas faire grand-chose, hormis garder le contact et tenter de vous convaincre, trouver une porte de sortie possible.

Alors, au pire, quelle que soit votre décision, prenez ces coordonnées, vous pourrez m’y contacter quand vous serez prête, si vous ne l’êtes pas maintenant. »
 
C’était à ses yeux le meilleur des compromis actuel possible : elle espérait évidemment que l’inconnue se rangerait à ses arguments, mais sinon… Eh bien le temps ferait son œuvre, ou bien alors… Mieux valait ne pas y penser pour le moment.
Invité
Anonymous
Un nom, une identité ? En avions seulement eu l'une ou l'autre un jour ? Un visage qui fût le nôtre ; possible de montrer afin de nous identifier et faire naître, comme elle avait existé naguère entre Nous, la confiance. Rien de tout cela n'existait encore. Ce n'était ni le bien, ni l'heure. Nous le sentions. Précipiter les événements ne saurait en rien nous mener à la Fin que nous poursuivions. Nous refusions, en cet instant, de commettre à notre tour Sa faute.

Pour le moment, rien n'eût pu être vu que ce masque et ses liserés griffé dans l'argent. Nous devions en être sûres. Laisser à notre Héraut une dernière chance de nous démontrer Son génie et de nous sortir de cette errance par bien des égards trop hasardeuse.

Nous nous relevions et faisions désormais face à cette noble dame.


« - Nous entendons vos paroles, Maître Von, et nous y adhérons. Au-delà de cet Homme, c'est le Cosmos tout entier que nous apprendrons à soigner selon votre voie. Mais il est trop tôt. Nous saurons revenir vers vous, quand nous sentirons le temps venu. Lorsque nous disposerons d'un visage que nous jugerons capable d'arborer devant vous, alors seulement nous tisserons les liens de confiance que vous désirez.

Il nous faut maintenant attendre le moment de ces retrouvailles et, pour l'heure, savoir si vous nous laisserez repartir avec tout le mystère dont était entouré notre venu. Le ferez-vous, Maître Jedi ? »


L'objet qui nous fut tendu en réponse fut facilement reconnu, tant il était usuel. Nous le prîmes, sans un mot, et le glissâmes dans notre habit, dans l'une de ses nombreuses poches cachées auxquelles nous pouvions accéder sans qu'aucun œil, même avisés, ne fût capable de le percevoir. Nous venions peut-être de mettre à l'abri ce qui serait notre pénitence.

« - Prenez ceci. Et quand vous serez prête, contactez-moi avec. Je saurais que c'est vous. Donc, oui, vous pouvez partir... Je sais que vous reviendrez. Vers moi, vers les jedis, et vers la Lumière.. »

La confiance, que nous eûmes un temps jugée dédaigneusement naïve il fut un temps, parvint presque à nous réconforter lorsque nous l'entendîmes claire dans ces dernières paroles du Maître Jedi. Sans plus un mot, nous exécutâmes une discrète révérence, de celles que nous avions déjà pu voir adresser par un Padawan à son Maître aux abords du Sénat, et nous disparûmes dans les méandres des couloirs jusqu'à rejoindre notre vaisseau.

Nous venions juste de quitter l'atmosphère de Dantooïne lorsque l'ordinateur, ayant tout juste terminé de calculer les coordonnées hyper-spatiales, initia le bon en hyperespace. Ce ne fut qu'à ce moment que nous procédions au retrait de la cellule d'énergie du petit holocommunicateur Jedi que le Maître Jedi Alyria Von nous avait transmis. Désormais inerte, l'appareil ne se réveillerait plus qu'au moment venu. Nous redevenions invisibles aux yeux de tous, à ceci près que deux grands esprits avaient désormais conscience de notre existence.


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