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Sénateur d'Aargau, Maître des Forges dans l'Empire Sith, et maintenant sous-secrétaire général du Rassemblement Républicain, à ce jour, le plus gros parti politique de toute la République... L'Ordre disposait enfin d'un héraut digne de ce nom : un homme puissant, charismatique, que plus rien ne pouvait arrêter. Un homme de pouvoir, au sommet de sa gloire. Cet homme : Lord Janos.

Le politicien savait que tout orgueil mal placé était d'emblée prohibé. Il savait qu'à trop goûter à la coupe de la politique, on y perdait la tête. Mais le triomphe était là, palpitant, flamboyant, et bien sage celui qui ne se serait guère enivré.

Nonobstant, Janos attribuait cette faiblesse impromptue au lavage dont sa mémoire artificielle avait récemment fait l'objet. Les données numériques que son corps cybernétique avaient amassées risquaient fort de le compromettre si par malheur elles venaient à être découvertes. Aussi avait-il fallu, immédiatement après l'attentat de Flydon Maxima, en évacuer tous les éléments indignes de la figure qu'il s'efforçait de se constituer. Et en vérité, un tel procédé avait laissé en son esprit un désagréable sentiment de vacuité. Le néant total. Après toutes ces années passées à ne plus se reposer que sur sa mémoire artificielle, le Lord se sentait comme affaibli, vidé de l'immense banque de données dont il disposait à souhait. Face à celle-ci, la simple mémoire organique paraissait infiniment plus subjective, bien plus sujette aux premières impressions et à toutes ces autres sensations sans réelle valeur. Le monde lui-même avait perdu la rigueur mathématique que lui offraient ses circuits électroniques. Ce vide avait mis Janos dans une humeur exécrable, et, sans conteste, son irrésistible ascension lui servait d'exutoire, comme un alcool épicé venant colorer la fadeur d'une existence sans but.

Pour autant, on ne pouvait pas dire que le sénateur était victime de l'oisiveté : en plus de ses nouvelles fonctions dans l'Empire Sith – dont il ne parlait à absolument personne, mis à part son bras droit – le Rassemblement Républicain lui prenait un temps fou. Ce n'était pas tout que de l'avoir mis en place : encore fallait-il prouver à la Rotonde que ce parti avait de la force, qu'il saurait survivre aux aléas de la conjoncture, et surtout, qu'il aurait l'occasion de s'accroître avec le temps. Dès les accords préliminaires signés avec Ion Keyïen et Valérion Scalia, Janos s'était engagé à faire venir de nouveaux membres autant qu'il serait en son pouvoir.

Sa toute première cible : Vincent Whesper, récemment promu sénateur de Coruscant. Un poste-clef qu'il serait stratégique de briguer, quitte à émettre quelques concessions. Le Lord n'avait pas encore eu l'occasion de s'entretenir avec le jeune homme ; cette première entrevue offrirait également la possibilité d'en connaître davantage sur un tout nouveau collègue.

Bien entendu, Janos n'avait pas annoncé officiellement à ce dernier qu'il comptait lui proposer une signature au bas de ces six Actes fondateurs dont il était lui-même l'auteur pour une bonne part. L'invitation qu'il lui avait adressée était on-ne-pouvait-plus vague, quoique parfaitement respectueuse des codes de politesse. Il s'était contenté de lui demander de le rejoindre dans la cantine du Sénat, un lieu agréable où les membres de la Rotonde étaient servis gratuitement sur les frais de la République,
«pour discuter», avait-il dit dans sa missive.

Il s'était déjà installé, un verre de brandy churban à la main, de ces boissons aux saveurs agréables et raffinées dans lesquelles il ne pouvait plus s'empêcher de noyer ses tourments, quand le jeune Vincent Whesper fit son entrée dans la vaste salle. Janos se leva aussitôt pour l'accueillir à sa table, un sourire sévère au visage.



«Sénateur Whesper. C'est un plaisir de vous rencontrer.»
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Enfin. Après avoir eu autant de sang sur les mains, avoir élaboré tous ces sombres plans, j'avais obtenu ce que je voulais. J'étais le sénateur de Coruscant. Une place plutôt importante dans cette république à laquelle je faisais miroiter ma soi-disante affection. Désormais, je savais que l'on s'intéresserait à moi. La crème de la crème s'intéresserait à moi, et si elle ne le faisait pas, je m'y intégrerai plus ou moins agressivement.

Un mouvement, des alliés, une cause à défendre... C'était ce qu'il me manquait pour séduire non plus Coruscant, mais la galaxie entière. Un masque de plus à porter, certes, mais un masque qui me protégerait bien plus longtemps que celui que j'utilisais maintenant. Bien sûr, il me fallait un bon parti à intégrer: un qui défendrait l'empire, la peine de mort ou la légalisation de l'esclavage ne passerait pas bien du tout aux yeux de la populace. Il me fallait quelque chose qui toucherait ces gens. Un nom aguichant, des idéaux, tout ça quoi...

D'un coup, mon majordome entra dans mon bureau. Il tenait en sa main droite une enveloppe. Bien sûr, il n'osa pas me perturber dans le quelconque travail que j'avais entrepris. Il fallut que je lui demande:

-Qu'y a-t' il mon cher ?

-Une invitation d'un certain monsieur Janos Monsieur.

Il déposa l'invitation au coin de mon bureau. Je n'y montrai pas d'intérêt tout de suite, mais aussitôt le marjodome hors de la pièce, je me jettais sur l'invitation. Celle-ci me conviait à un rendez-vous avec messire Janos sans pour autant être plus claire. Janos... Janos... Ce nom me disait quelque chose. Le sénateur d'Aargau, si je me souvenais bien.
J'avais entendu parler d'une sorte de parti politique qu'il avait créé. Je n'étais sûr de rien; mais le peu de chose dont j'étais à peu près sûr me conformait dans l'idée que je devais me rendre à ce petit tête à tête.

-Janos... Comme j'ai hâte de te rencontrer...

Le jour J, mon chauffeur me conduisit au rendez-vous. Pendant le trajet, je ressentis un petit trac. Pourquoi ce sénateur faisait-il pour m'impréssioner sans que je l'ai rencontré une seule fois ? Je n'avais aucune raison d'être inquiet. Je n'avais rien à craindre après tout, l'entrevue n'était pas médiatisée, mes paroles ne seraient pas forcément prises pour argent comptant.
Enfin, je poussais la porte de la pièce dans laquelle le sénateur m'attendait. Immédiatement sa présence s'imposa en moi. Il faut dire que sa façon stricte de se tenir me chamboula, car je m'attendais plus à un quinquagénaire souriant et à l'air naïf. Il suffit qu'il m'appelle "sénateur" pour que je retrouve confiance en moi. Il était mon égal, je n'avais pas à me sentir rabaissé.

-Sénateur Janos, je suis enchanté de faire votre connaissance...

Je ne me retins pas bien longtemps, il m'était impossible de faire taire les inombrables questions qui résonnaient dans mon crâne. Je me laissais finalement prononcer la question qui brûlait mes lèvres:

-Que me vaut le plaisir de cette entrevue sénateur ?
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Lord Janos prit place en face de son invité. En quelques secondes, son œil artificiel s'adonna à une brève analyse physiognomoniste du visage du jeune homme, mais il ne parvint pas à en tirer grand chose de concluant. Le Sith tenta également de sonder son esprit, mais ici aussi, il se heurta à une importante résistance, comme souvent chez les politiciens ; aussi renonça-t-il à toute investigation. De toute façon, une simple conversation pouvait en dire infiniment plus que n'importe quel artifice ou pouvoir de la Force.

Il attendit que Whesper décide de sa collation avant d'entamer la discussion.


«Je ne vous cacherai pas que j'aime rencontrer mes collègues en tête à tête, sénateur. On en apprend bien plus en conversant avec un politicien qu'en regardant ses discours et autres interviews : je suppose que vous ne me contredirez pas sur ce point...»

Janos croisa les jambes tout en inclinant légèrement sa tête sur le côté.

«Ce faisant, on sait en quelques minutes si notre interlocuteur se ralliera à nous, ou si au contraire il cherchera à causer notre perte. Ainsi sont les dures lois de la politique : on privilégie ses amis et on anéantit ses ennemis. La loi de la jungle dépourvue de tout instinct de survie.»

Le sénateur se savait audacieux. Bien plus audacieux qu'il ne le fut jadis, d'ailleurs. Mais à présent, plus rien ne pouvait le retenir. Et la dictature du politiquement correct le répugnait de plus en plus...

«Je ne me cacherai donc pas derrière le masque de l'hypocrisie, sénateur. Soit à l'issue de cet entretien, nous serons devenus les meilleurs amis du monde, prêts à anéantir tout opposant à notre course - je pense notamment à ce scélérat de Rejliidic qui serait presque prêt à me faire assassiner pour asseoir son petit pouvoir ridicule - ; soit nous nous quitterons ennemis et le premier à tuer l'autre aura gagné.»

Un court instant, la raison du sénateur lui cria : Espèce de fou ! Qu'est-ce que tu fabriques ? Mais Janos chassa cette idée fugace de son esprit et transforma ce soudain élan de culpabilité en une irréductible fierté : oui, cette fois, oui, il osait aller au bout. Et s'il devait en payer les frais, tant pis ! Au moins n'aurait-il pas à affronter la conscience de ne pas s'être battu jusqu'à ses dernières forces. Car l'Ordre était en guerre, désormais : si son idéal désirait survivre, prospérer, s'inscrire dans la réalité, il ne lui fallait plus un simple orateur, mais un véritable soldat.

«Ceci dit, vous avez face à vous le sous-secrétaire général du Rassemblement Républicain, à ce jour le plus gros parti de notre cher régime. J'ai ma réputation, j'ai des appuis. En ce moment, j'ai beau défendre la voie du bellicisme alors qu'une majorité servile désire s'enliser dans une paix stérile, il n'empêche : on peut me considérer comme l'un des politiciens les plus puissants de toute la République. Ce n'est qu'une simple remarque passagère, bien entendu : faites-en ce que vous voulez...»

Le Lord esquissa un sourire d'une courtoisie toute ironique en levant son verre :

«Sur ces mots de bienvenue, santé, sénateur Whesper !»

Puis il avala son brandy cul-sec. Décidément, comme il était libérateur de dire les choses en face !
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